A elle a bien changé, la petite France Gall qui avait séduit la France à 16 ans en mettant gentiment en boîte ce « Sacré Charlemagne », d’une petite voix pointue qui fleurait encore bon la cour de récréation.
A 29 ans, mariée à l’auteur-compositeur Michel Berger, elle vient de recevoir à New York un disque d’or pour fêter son 100 000e disque « Musique » en même temps que Michel recevait le sien.
Triomphe à l’américaine pour la « petite poupée française ». La firme de disques Atlantic avait mis trois limousines grandes comme des résidences secondaires à leur disposition. France a choisi une Lincoln marron, la même que celle du président Kennedy, sept mètres de long, bar et télévision couleur.
Déjeuner de 100 couverts au « 21 », le restaurant le plus chic de la ville. Match de gala de football pour les adieux du roi Pelé : France était installée entre Cassius Clay et Kissinger et elle n’a pas beaucoup regardé le ballon. Shopping dans la 52e rue, quelques dizaines de chapeaux et un imperméable à 7 francs, entre deux émissions de télévision. Puis France et Michel sont partis à Montréal pour une série d’émissions radio et télévision avant de regagner Paris où ils sont si bien. Pour vivre heureux, ils ont choisi de vivre cachés. France et Michel sont curieusement installés dans une isba tout à fait russe, dans un hameau « folklorique » édifié pour l’exposition universelle de 1889, boulevard Suchet. France l’a meublée elle-même en style 1930 en fouinant dans tous les marchés aux puces de Paris et de la région parisienne, sa passion. La petite fille trop gâtée qui avait atteint son premier million de disques à 18 ans, la baby star qui faisait un peu n’importe quoi est devenue une vraie professionnelle et une vraie femme. Elle s’est mariée discrètement, mais pas secrètement, avec Michel Berger qui est à l’origine de sa seconde carrière qui a redémarré avec « Aime la ».
Ils se sont aimés. C’est tout simple. France est même devenue une fine cuisinière, elle peut passer des journées entières à popoter, mais comme tous les grands cuisiniers, elle ne mange presque rien et elle est restée aussi menue qu’à 16 ans. Seule sa voix a changé et elle fera sa rentrée sur une scène à Paris en avril prochain après sept ans d’absence.
Il y a une bonne raison à ses absences : elle déteste se coiffer, se maquiller, s’habiller. Chez elle, France porte toujours des vêtements d’homme, flottants, confortables, et elle noue ses cheveux blonds en queue de cheval. Mais, pour reconquérir son public, elle retournera chez son coiffeur. Michel Berger y veillera.
Magazine : Paris Match
Article de François Pedron
Photo de Paul Slade
28 octobre 1977
Numéro : 1483
Merci à Elisabeth