Angoisse pour France Gall (Presse)

L’article retranscrit

Un jour de 1973, France Gall entend à la radio une voix qui fredonne “Attends-moi” …

Immédiatement, elle sait qu’il va se passer quelque chose entre elle et l’interprète de cette chanson. Et elle ne se trompe pas !

Car cet homme, c’est Michel Berger, et il ne deviendra pas seulement son Pygmalion, mais aussi l’amour de sa vie et le père de ses enfants!

Hélas, comme tout le monde le sait, le 2 août 92, Michel Berger succombe à une crise cardiaque sur le terrain de tennis de leur villa à Saint-Tropez ! Cinq ans, cinq ans depuis la mort de Michel… Et malgré Je temps qui passe, malgré les petites phrases que France tente de se répéter, comme “le temps apaise toutes les douleurs”, elle est toujours en proie à un inconsolable chagrin …

Oui, le deuil de France continue d’assombrir sa vie jour après jour. Toute femme qui a perdu l’homme qu’elle aimait peut comprendre ce qu’elle ressent. Mais sans doute ces deux-là s’aimaient-ils au-delà de l’imagination …

Car les jours ont beau s’écouler, sa douleur ne s’efface pas.

Ses proches avaient, pourtant espéré que le plus dur était derrière elle. C’est vrai que certains signes ont pu laisser croire que la jeune femme s’en sortait peu à peu. Par exemple, quand, l’année dernière, elle a trouvé la force de réaliser son disque, «France», composé des chansons de Michel, on a espéré que ce travail jouerait le rôle d’un exorcisme. Aller chercher dans le répertoire de son mari ses plus belles chansons, et, comme un hommage merveilleux, les interpréter avec une sensibilité à fleur de peau … Oui, on a pensé qu’avec ce geste, France avait réussi à dominer son chagrin. C’est vrai aussi, qu’au fil de ses déclarations à la presse, on avait l’impression qu’elle retrouvait petit à petit son envie de vivre. En tout cas, elle semblait vraiment tout faire pour y parvenir, en battante qu’elle est: « Je suis sûre que je vais vivre une histoire ou des histoires d’amour. Je l’espère, je suis prête. Je ne vois pas pourquoi ma vie de femme devrait s’arrêter», confiait-elle l’année dernière au magazine Elle.

France a même cru que son cœur battait à nouveau pour quelqu’un. Elle l’a cru, elle y a fait discrètement allusion, mais c’était sans compter sur la force du souvenir … Un souvenir encore plus présent ces derniers jours que s’approche la date anniversaire de la mort de Michel.

C’est justement là, dans la grande maison de Pampelonne, « leur » maison, que France a voulu revenir cet été. Sans doute avait-elle pensé qu’enfin, elle pourrait s’y retrouver sans que les fantômes du passé ne resurgissent : « J’attends avec impatience le premier été où je m’y sentirai bien », avait-elle dit l’an dernier.

Mais le terrain de tennis est toujours là, à quelques mètres de la maison … Les meubles sont les mêmes, les petits objets d’art que France et Michel passaient leur temps à chiner dans les brocantes n’ont pas changé de place.

Alors soudain, en revenant à Saint-Tropez cet été, France s’est retrouvée toute seule face à son deuil. À cet instant, elle a su, elle a compris que rien n’avait changé … et ne changerait jamais ! Affreuse révélation que celle de la solitude irrémédiable !

Ces cinq années passées à se dire que le temps allait opérer son travail de guérisseur d’âme, réduites à néant. France est là, face à elle-même, face à la mort de celui dont la mémoire est toujours intacte … La première fois qu’elle l’avait entendu, il chantait « Attends-moi ». Lui, le 2 août 1992, ne l’avait pas attendue … Comme il y a un an, elle reste cloîtrée dans l’enceinte de la « Grande Baie », cette demeure où elle a partagé avec Michel ses plus belles vacances.

Seuls quelques intimes sont autorisés à lui rendre visite. Mais on ne la voit pas au marché de Saint-Tropez, encore moins dans les nouveaux lieux à la mode ou même sur le port. On pourrait croire que France a accroché à la porte de sa maison le panneau “Ne pas déranger” …

Dans chaque pièce, Michel est là, et le piano résonne d’un silence douloureux. Son ombre est sur ses yeux, dans son cœur, cette ombre qui fut sa lumière. Car Michel l’a non seulement aimée, admirée, protégée. Il l’avait aussi révélée à elle-même, comme femme et comme artiste.

Magazine : France Dimanche
Par Nathalie Bertaud
Crédits des photos : Jerrican / Cosmos
Date : 26 juillet au 1er aout 1997
Numéro : 2656

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