Michel m’a sauvée de la dépression

Aurait-elle tout au fond de son cœur une irrépressible violence qu’elle chercherait à assouvir à tout prix ?

Toujours est-il que la douce France Gall, célèbre pour les chansons douces que lui compose tout en douceur son doux compositeur de mari, apprend depuis quelque temps le karaté !

« Mais qu’on ne s’y trompe pas, ce n’est pas par plaisir mais plutôt par perfectionnisme, dit-elle ; il y aura dans mon prochain spectacle une scène de karaté et je tiens à la jouer le mieux du monde. Cela dit, je n’arrive pas à me faire à ce sport très violent ».

Son prochain spectacle, c’est en septembre qu’elle le donnera, Porte de la Villette à Paris, dans l’enceinte du déjà fameux Zénith inauguré victorieusement par Renaud en janvier dernier. Le Zénith qu’elle a choisi parce qu’avec son immense capacité d’accueil il représente un nouveau pari à tenir : « c’est vrai que c’est très grand là-bas … il faut remplir. Mais la salle me fait un effet fantastique, je la trouve très belle. Au Palais des Sports il se passe toujours quelque chose avec le public et je sens que ce doit être pareil au Zénith. C’est pourquoi ce choix qui est une façon de viser encore plus haut, je l’ai fait sans crainte. Il faut savoir prendre des risques dans ce métier … J’espère simplement que les gens viendront jusqu’à là-bas, c’est un peu loin ». Pas de trac donc, mais un plaisir encore plus fort à l’idée de retrouver son public : « Étant donné que je ne fais pas de photos pour la presse, que je ne donne pratiquement pas d’interviews, c’est ma façon à moi de récompenser les gens qui m’aiment … mon acte d’amour à mon public. Dans de tels moments, je le sais d’expérience, le plaisir de chanter efface le trac ». De « Débranche », déjà un tube et aussi sa chanson préférée de l’album, elle se plaît à dire que c’est un titre agréable à défendre : « Je suis tout à fait d’accord avec le texte, je me dis d’ailleurs la même chose très souvent mais sans arriver à appliquer la formule !

Sur le même album j’aime aussi beaucoup « Tu comprendras quand tu seras plus jeune ». La mélodie est très cool … tout ce qui me plaît chez Michel Berger ». Michel Berger. Le mari. L’auteur. Le compositeur. L’homme qui lui a permis de renaître. Comme femme et aussi comme artiste.

« Après la grande vogue des « sixties », mon dernier succès avait été « Bébé requin » en 1969. Et puis plus rien. J’étais oubliée ». Dans les choux la petite France de « Poupée de cire, poupée de son » ou des « Sucettes à l’anis » qui avait connu la gloire à 16 ans et se retrouvait soudain dans la peau d’une « has been » à l’âge où d’autres s’apprêtent seulement à commencer une carrière. Les années 70 commencent sans elle parce qu’ elle ne veut plus être un « bébé qui chante ». La déprime guette et elle est au bord de l’abandon lorsque son attention est attirée par « Attends-moi » la chanson d’un certain Michel Berger.

« Du coup, j’ai écouté d’autres choses de lui et tout de suite j’ai adoré sa musique et ses mots. Je lui ai demandé de travailler pour moi. Il m’a dit « non ». Très gentiment mais il avait peur d’un échec pour nous deux. Alors j’ai insisté. Pour la première fois de ma vie, j’avais envie d’aller vers quelqu’un. Mais attention, c’était strictement professionnel car, à cette époque, de toute façon, je n’étais pas disponible. Vaincu par tant de volonté. Michel finit par céder.

« Aime-la » remet France sur le bon chemin puis en 1976, c’est « Ma déclaration» et le succès reconquis. La même année, elle épouse son auteur-compositeur et continue, huit ans après, d’affirmer « Berger, c’est l’homme de ma vie ». Ce qui compte le plus pour elle avec Pauline, cinq ans, et Raphaël, trois ans. « Je suis romantique, c’est vrai. Et je crois au grand amour. Mais je trouve la passion invivable. Je lui préfère mille fois l’amour serein, ce que je vis avec Michel ».

Sensible, émotive.

« Je pleure très facilement pour un oui pour un non », elle n’a jamais cru qu’artiste rimait forcément avec bohème : « J’aime notre maison, et y recevoir des amis. Je pense être une bonne épouse et une bonne mère. En fait, j’aime les traditions, le respect des horaires. Je suis plutôt sévère avec les enfants. Je n’applique pas la politique du « laisser-faire et laisser-aller ». Il y a longtemps, les médecins m’avaient dit que je ne pourrais pas en avoir, aussi j’apprécie d’autant plus aujourd’hui d’en avoir deux et j’essaie de leur donner la meilleure éducation possible. Cela dit, nous n’en voulons pas d’autre ».

De l’année qui vient, elle dit que ce sera « l’année France Gall » mais n’y voyez aucune prétention à être la meilleure : « Je dis cela simplement par rapport à Michel. Une année il travaille pour moi, une année pour lui et l’amour fait tourner tout ça ! »

Magazine : Télé Magazine
Par Laure Palmer
9 juin 1984
Numéro : 1492

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