France Gall, la déclaration d’amour

Édito

Petite fiancée des Français, France Gall a rayonné durant les sixties, mais elle n’est réellement devenue star qu’après sa rencontre avec son pygmalion, Michel Berger, qui l’a consacrée au rang d’étoile.

Née dans le monde de la musique, baignée dans l’industrie du spectacle, avec sa bouille mutine et sa crinière blonde, elle s’est imposée au fil des années dans le paysage musical français, des fameuses Sucettes à Sacré Charlemagne, en passant par Ella, elle l’a, Résiste ou Si, maman si.

Compagne de Claude François, Julien Clerc … elle était “La groupie du pianiste”, et tout au long de sa vie, elle a connu des moments de joie, mais aussi bien des drames. Des larmes qui n’ont cessé de couler que lorsqu’elle est morte, dans les bras de son fils, Raphaël. Étoile qui brille désormais aux côtés de sa fille adorée, Pauline, partie trop tôt, à l’âge de 19 ans, et de l’homme de sa vie. Découvrez son histoire, ses secrets, les dessous de ses plus grands hits … Bonne lecture !

D’Isabelle à France Gall !

L’histoire a commencé comme un conte de fées et s’est malheureusement terminée comme une tragédie antique. Mais pour l’heure, ne nous intéressons pas aux heures les plus sombres … Abordons plutôt les débuts de la vie de celle qui deviendra un jour France Gall. Des débuts heureux … Car dès son premier souffle, il semblerait que les fées se soient toutes penchées sur le berceau de la petite Isabelle Geneviève Marie Anne Gall. Adorable poupon qui a poussé son premier cri le 9 octobre 1947, dans le 12e arrondissement de Paris. De quoi combler de joie ses parents, Robert Gall et Cécile Berthier. Un couple bercé par la musique et la chanson, pour qui l’arrivée de cette petite fille résonne comme une belle mélodie du bonheur.

Son père est un ancien élève du conservatoire. Il est chanteur et auteur, bien connu de la scène musicale. C’est lui qui a imposé Les Amants merveilleux d’Édith Piaf (1960) ou encore La Mamma de Charles Aznavour (1963).

Sa mère est la fille de Paul Berthier. Encore une preuve que la musique coule dans ses veines ! Ce dernier est en effet le cofondateur de la Manécanterie des Petits Chanteurs à la Croix de Bois. Mais ce n’est pas tout … La mère de la future France Gall est également la nièce de Jacques Berthier, qui est compositeur et organiste, mais aussi la cousine de Denys Lable, guitariste, et de Vincent Berthier de Lioncourt, fondateur du Centre de musique baroque de Versailles.

Dès ses premiers jours, la petite Isabelle est surnommée Babou. Un surnom qu’elle portera tout au long de sa vie … Mais il ne s’agit pas du seul surnom dont elle sera affublée. Comme elle est dotée d’un sacré caractère et qu’elle aime mener les troupes, son papa lui donne le titre de « petit caporal ». Un surnom qui lui va comme un gant ! Tout le monde s’amuse beaucoup de cette petite princesse à la crinière blonde, qui distribue des ordres à tout va …

A 5 ans, elle se tourne tout naturellement vers la musique, et débute le piano, sous la houlette de ses parents. Il faut dire qu’à la maison, la musique est toujours présente. Isabelle va grandir entourée de musiciens, les amis de ses parents. Elle connaît très tôt les soirées qui s’éternisent jusqu’au petit matin, où les bœufs rythment les nuits, et où elle finit par s’endormir dans un coin du salon, bercée par les rires et les chants de ses proches. À 11 ans, elle se passionne pour la guitare, la peinture et les jeux de société. Tous ceux qui la rencontrent à cette époque disent d’elle que c’est une fille à l’esprit vif, très curieuse.

La petite Isabelle est très proche de ses frères, Patrice et Philippe, et vers l’âge de 13 ou 14 ans, elle commence la musique à leurs côtés. Ensemble, ils forment un orchestre qui, tous les étés, joue sur les plages et l’hiver, à Paris. Une fratrie qui décoiffe et qui séduit. Au domicile de ses parents, elle voit défiler tout le gratin de la scène musicale française : Claude Nougaro, Marie Laforêt ou Hugues Aufray. Parfois, elle accompagne même son père, qu’elle adore, dans les coulisses de l’Olympia où elle découvre l’envers de la scène. À cette période de sa vie, elle manque beaucoup l’école. En effet, elle suit son père sur les routes, pour applaudir en concert Gilbert Bécaud, Édith Piaf ou Charles Aznavour. Cette une vie de saltimbanque, qu’elle adore ! Et forcément, elle va finir par redoubler. Au lycée Paul-Valéry, elle rate son baccalauréat et prend la décision d’arrêter ses études. C’est en 1963 qu’Isabelle Gall donne son premier concert privé, dans l’atelier de Noël Brochet, à Auxerre.

Pour la future artiste, c’est un grand jour. Et son concert est un vrai succès. Son père décide qu’il est l’heure de mettre le talent de sa fille sur le devant de la scène. Il la pousse alors à enregistrer des chansons, et remet les bandes à un éditeur musical, Denis Bourgeois. Ce dernier est séduit par la voix et le dynamisme de la jeune fille, pétillante et si jolie. Le 11 juillet, il décide de l’auditionner au Théâtre des Champs-Élysées. La jeune Isabelle est très stressée. Elle s’apprête à chanter 5 chansons, et en coulisses, elle ressent la tension monter. Pourtant, elle va rassembler ses forces et son énergie pour cette audition si importante. La première de sa vie !

Et quel carton ! Denis Bourgeois est persuadé de tenir un diamant brut entre ces mains ! Comme elle est encore mineure, c’est son père qui va signer pour elle un contrat avec la maison de disques Philips. C’est le début des premières sessions studio … Aux côtés d’Alain Goraguer, elle enregistre quatre titres. C’est à ce moment précis de sa vie qu’elle devient « France ». Ce changement de prénom intervient afin que son prénom, Isabelle, ne rivalise et ne vienne interférer avec le nom d’artiste d’Isabelle Aubret, jeune chanteuse de la même maison de disques. Elle devient alors France Gall à la scène.

Sa carrière sur de bons rails

Les sixties battent leur plein. C’est une époque joviale, pleine d’espoir et terriblement rock’n’roll pour la nouvelle génération qui voit émerger de nombreux talents … France Gall en est persuadée : elle veut faire carrière dans la chanson. Sur scène, elle se sent bien, épanouie, et heureuse, et ce, même si elle ne chante pas encore les chansons qu’elle aimerait chanter.

C’est le 9 octobre 1963, le jour de ses 16 ans, que son premier titre est diffusé sur les ondes. Quel joli cadeau que celui d’entendre sa voix à la radio française ! Ses chansons vont être diffusées au fil des mois et vont connaître un succès relatif, mais c’est le titre Ne soit pas si bête qui devient un titre phare, marquant de cette époque. Un vrai succès. Et comme presque tous les tubes qui ont marqué les années yéyé, il s’agit d’une adaptation d’un standard américain. Pour son premier tube, France Gall se place à la 44e place du hit-parade de « Salut les Copains ». Nous sommes au mois de novembre, et la jeune artiste flirte avec des étoiles telles que Michel Berger et Charles Aznavour. Ses équipes sont ravies de voir que France Gall, le diamant brut façonné par Denis Bourgeois, touche son auditoire. La « gamine » se retrouve dans le « hit », impossible de ne pas être séduit par son brin de voix, son punch, sa bouille ronde et sa crinière blonde. Quelque chose de malicieux dans son regard, et ce sourire : elle fait mouche auprès du public. Les garçons sont fous amoureux, et les filles veulent toutes lui ressembler.

Par ailleurs, Denis Bourgeois va avoir une idée brillante, et particulièrement fructueuse. Car à cette époque, la carrière de son poulain, Serge Gainsbourg, est malmenée. Malgré plusieurs albums et plusieurs succès, le compositeur piétine. Ses chansons sont boudées. En revanche, on reconnaît ses compositions pour des chanteurs de la rive gauche, comme Juliette Gréco ou Michèle Arnaud. Force est de constater que Gainsbarre s’en sort mieux lorsqu’il écrit pour les autres … Alors, il va lui proposer d’écrire pour sa nouvelle protégée, France Gall.

C’est ainsi que le sulfureux Gainsbourg va prendre sa plume pour écrire et composer N’écoute pas les idoles, qu’il propose à France Gall. La chanson fait partie des titres du deuxième 45-tours de la chanteuse, qui va se classer en tête du hit-parade. Nous sommes en mars 1964, et la carrière de la pétillante chanteuse va prendre un tout autre tournant. Et surtout, pour elle, travailler avec Serge Gainsbourg est un bonheur immense.

Une sorte de rêve qui devient réalité. Elle découvre que l’homme derrière le personnage est touchant, bourré de talent – elle le savait déjà – , mais si bien éduqué et élégant, elle ne l’imaginait pas à ce point !

« C’est quelqu’un que j’avais du plaisir à voir, parce que je l’admirais, et j’aimais aussi ce qu’il écrivait. Et j’aimais bien sa timidité, autant que son élégance et son éducation. C’était très agréable comme relation, et j’étais très impressionnée que cet homme travaille pour moi, et s’intéresse à moi. » France Gall.

Pour la première fois, le magazine Paris Match lui consacre un article. C’est alors qu’elle assure la première partie de Sacha Distel, le 14 avril 1964. Maurice Dizé, également parolier, devient son imprésario. Tout s’accélère alors pour le nouvel espoir de la scène française qui se retrouve au cœur d’une équipe composée de sacrés poids lourds. Les vétérans du métier font bloc autour d’elle. Et il faut l’avouer, elle ressent une certaine pression. Cependant, elle ne se laisse pas intimider … France Gall campe sur ses positions, et tente de défendre coûte que coûte les chansons de son répertoire, comme Pense à moi, coécrite avec son père. Pourtant, elle écoute les conseils des plus grands, qui décident de lui créer un répertoire original et différent. Et ce, alors qu’au même moment, ses collègues chanteurs ont recours à des adaptations de succès anglo-saxons.

Et ils sont nombreux à l’aider à se distinguer, puisque les plus grands auteurs et compositeurs du moment se bousculent à sa porte les bras chargés de chansons pour la femme-enfant que tous voient déjà comme la nouvelle star de demain : Joe Dassin, Jean-Michel Rivat, Frank Thomas, Jacques Datin, Pierre Delanoë …

Il y a eu Jazz à gogo, et Mes premières vacances, mais c’est durant l’été 1964 que l’association Gainsbourg/Gall crève le plafond. Et c’est grâce au titre Laisse tomber les tilles, qui tourne en boucle sur les ondes, que France Gall se place en tête des podiums. Gainsbourg s’empare de son rire pour le coller sur Pauvre Lola. Le duo semble inséparable et inarrêtable. Un tsunami qui déferle sur la scène française. Elle et son visage d’ange, lui et sa gueule cassée. Qui l’aurait cru ?

À la fin de l’année 1964, la chanteuse adulée par les médias, encensée par la critique pour ce brin de fraîcheur presque insolite qu’elle apporte sur la scène française, va chanter un titre qu’elle regrettera pendant des années, et qui pourtant va la faire monter encore plus près des étoiles, Sacré Charlemagne.

Serge Gainsbourg et France Gall

Ah, les années 60 ! Les années yéyé rythmaient le quotidien des Français, et Salut les Copains était une véritable bible. Le concert place de la Nation est organisé, et France Gall enregistre ses premiers titres. Elle ne rêve que d’une chose : se débarrasser de cette image trop lisse de lolita ingénue. Et cela tombe bien, car elle va croiser la route d’un homme dont tout le monde parle … Un homme réputé pour être « tout » sauf lisse. Dont les coups de gueule et les apparitions, à chaque fois, électrisent le tout-Paris et les médias. Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, impossible de passer à côté du personnage Serge Gainsbourg.

Qui de mieux pour casser cette image de petite fille lisse qu’un Serge Gainsbourg avec sa tignasse grasse, sa clope au bec et ses textes provoc’? Même s’il n’est pas encore à cette heure précise le roi de la provoc’ que l’on connaîtra dans les années 70, son personnage est déjà très sulfureux. Et pour France Gall, il incarne clairement la modernité. La « rebelle attitude ». L’anticonformisme. Et c’est exactement ce qu’elle cherche pour sa nouvelle image.

Gainsbourg entre en scène. Il a entendu parler de cette jolie poupée blonde dont tout le monde assure qu’elle sera la star de la nouvelle décennie, et il veut travailler pour elle. Justement, il trouve qu’elle a un truc. Quelque chose à assombrir, ou à ponctuer d’une touche d’ironie. Telle que racontée par le dessinateur et réalisateur Joann Sfar dans le somptueux long métrage Gainsbourg, vie héroïque (2010), la toute première rencontre entre le fumeur de gitanes et l’adolescente a sûrement ressemblé à cela …

À cet instant précis, Serge Gainsbourg n’est pas encore la grande star que l’on connaîtra durant les années suivantes. À cette époque, « Gainsbarre » fait parler de lui, mais plus pour son personnage tendancieux que pour ses chansons. Dans le monde de la musique en revanche, ses talents d’auteur et de compositeur sont connus et reconnus de tous. Et à ce moment-là, lui n’a pas vraiment envie d’écrire pour Johnny Hallyday. Il trouve très intéressante l’idée de pervertir une jeune fille si douce et si innocente … Lui donner un côté plus coquin, à la limite du trash … Et c’est ainsi qu’il va lui offrir le fameux texte Les sucettes qui fera tant scandale. Mais avant de lui offrir le titre Les sucettes, Serge Gainsbourg va plusieurs fois prendre sa plume pour elle ! Il faut dire qu’après leur rencontre, les deux se sont très bien entendus. Ils ont développé un lien particulier. Car derrière son côté « prude », France Gall dissimule une sacrée répartie et un vrai sens de l’humour. Grâce à lui, elle devient la chouchoute de Salut les Copains, et flirte avec les étoiles. Quand le tube sort en 1966, France Gall est au Japon. Le titre cartonne, mais il va aussi déclencher une sacrée polémique ! Il faut dire que les paroles sont plus qu’ambiguës … Pourtant, France Gall le jure, elle ne savait rien du double sens de cette chanson : « Quand il a écrit la petite chanson, je me voyais aller acheter ma sucette, se souvient-elle. C’était l’histoire d’une petite fille qui allait acheter ses sucettes à l’anis ! Quand Serge me l’a chantée au piano, je l’ai tout de suite trouvée très jolie. » ! Hélas, après quelques jours, elle comprend le vrai sens du titre : « C’était horrible, horrible ! Ça a changé mon rapport aux garçons. Ça m’a humiliée, en fait ! En même temps, je sentais que ce n’était pas clair… C’était Gainsbourg quand même ! ».

Cet épisode de sa vie, France Gall l’a peu de fois évoqué. Il faut dire que des années après, le ressentiment est toujours là. Cette sensation d’avoir été dupée … Sous des paroles innocentes, « Annie aime les sucettes/Les sucettes à l’anis », l’auteur faisait implicitement allusion à un gamahuchage que l’innocente interprète de 19 ans n’avait pas encore décelé: « Je n’en comprenais pas le sens et je peux vous certifier qu’à l’époque personne n’en comprenait le double sens», a certifié France Gall, lors d’un entretien accordé aux lecteurs du Parisien, pour la sortie de sa comédie musicale Résiste. Grâce à Gainsbourg, elle a triomphé à l’Eurovision 1965 grâce au titre Poupée de cire, poupée de son. Suite à cela, les deux artistes se voient alors tous les trois mois pour trouver de nouveaux tubes, et c’est ainsi qu’est née la chanson du scandale : « Avant chaque disque, Serge me demandait de lui raconter ma vie, ce que j’avais fait pendant les vacances. Alors, je lui ai dit que j’étais allé à Noirmoutier chez mes parents. Là-bas, il n’y a pas grand-chose à faire, sauf que, tous les jours, j’allais m’acheter une sucette à l’anis … »

Claude François – Une passion destructrice

Quand France Gall et Claude François se rencontrent, en 1964, il est important de le rappeler, lui, est encore un homme marié ! Les deux vont se croiser, se plaire, se chercher, et puis finalement, se trouver. Difficile de résister à une telle alchimie … Les deux artistes sont attirés l’un par l’autre comme deux aimants. Il faut dire qu’ensemble, ils sont superbes ! Tous les deux blonds, sublimes, semblant sortir d’un monde onirique où rien ne peut les arrêter. Tous deux adorés par les Français … On ne pouvait rêver d’une plus belle histoire pour fasciner la génération yéyé.

Au début, entre eux, l’histoire d’amour est secrète. Cachée. Claude François n’étant pas un homme libre, au début, il faut faire attention. Ne pas trop attirer l’attention. Un pari difficile pour ces deux personnalités qui sont déjà au centre de toutes les discussions, et suivies par les paparazzis. Au bout de quelques mois, la relation éclate au grand jour et fait la une de tous les magazines. Ce qui n’arrange pas les affaires de Clodo, toujours marié à Janet Woollacott. France Gall est littéralement sous le charme de l’artiste de 25 ans. Qui ne le serait pas ? Il est adulé par toutes les femmes, qui font la queue devant sa loge dans le but d’être choisies pour passer la nuit avec lui. France Gall n’a alors que 17 ans, sa carrière est en pleine ascension, et elle le regarde avec ses grands yeux émerveillés d’avoir pu attirer son attention ! À cette époque, il n’y a que Johnny pour égaler Clodo. Et c’est elle qu’il a choisie pour partager sa vie ! Certes, l’idylle ne va pas durer bien longtemps, mais elle sera incroyablement forte et passionnelle.

Dans cette histoire d’amour, il y en a une qui aime, et l’autre qui aime trop. L’autre, c’est Claude François qui, dévoré par la jalousie, va malheureusement tout gâcher. Dès qu’elle s’éloigne un peu trop, il s’énerve, envoie tout valser et lui dit des choses horribles ! Quelle mauvaise idée pour un homme aussi possessif d’avoir jeté son dévolu sur une chrysalide qui est en train de se changer en papillon. Et c’est justement à la suite de la victoire de France Gall à l’Eurovision que tout va basculer. Et pour cause, après avoir gagné, la jeune première dans le monde de la musique ne pense qu’à une chose  : appeler l’homme qu’elle aime. Seulement voilà, dans cette relation aussi passionnelle que destructrice, sa moitié n’apprécie guère de savoir que les feux des projecteurs vont, encore plus, être braqués sur elle. Et il va le lui dire, comme elle le confiera plus tard : « J’étais avec un garçon et j’ai demandé à ce qu’on appelle ce garçon quand j’ai gagné. Ce garçon, juste avant que je monte sur scène, pour aller rechanter ma chanson, il me dit: « Je te quitte ». Donc moi qui étais très amoureuse, je pleure. Et on me pousse sur scène et on voit que j’ai plein de larmes, mais ça n’a rien à voir avec le fait que j’ai gagné ».

Une rupture douloureuse, qui n’a pas duré bien longtemps. Car pour la chanteuse, il est hors de question de baisser les bras. Son Claude, elle l’a dans la peau, et elle n’imagine pas sa vie sans lui. À quoi bon avoir gagné si ce n’est pour partager ce grand moment de bonheur avec celui qui fait battre son cœur ? Après sa victoire au Luxembourg, elle ne reste pas. Elle prend le premier train pour Paris, afin d’aller retrouver l’homme qu’elle aime. Elle va tout faire pour le reconquérir, et cela va fonctionner. Claude François accepte « de la reprendre ». Le couple remet le couvert, c’est reparti pour un tour. Un nouveau tour de piste. France Gall y croit car elle est persuadée que leur histoire d’amour a encore une chance de fonctionner. Mais elle va vite déchanter …

Ensemble, ils vont tenter de renouer, une fois encore. De retrouver la passion d’antan, la complicité, et l’alchimie. Les week-ends au moulin s’enchaînent, la vie à deux dans l’appartement de l’artiste … Mais ce couple était trop fragile, et des crises de jalousie, Cloclo en fera d’autres. France Gall ne supporte plus son mauvais caractère, ni son comportement … Les scènes en public, et même, la violence. Un jour elle le quitte, pour de bon, et ne reviendra jamais. La rupture sera définitivement consommée en juillet 1967. Derrière la jalousie de Claude François se cache une rumeur qui ne cessait d’enfler: celle selon laquelle France Gall aurait eu une liaison avec un autre ! En l’apprenant, Clodo qui se trouvait alors en Belgique, aurait demandé à être rapatrié en urgence à Paris. Christian Morice, se souvient de cette scène de colère : « J’ai supplié France Gall de quitter les lieux avant de rentrer … En vain. Claude pénètre dans l’appartement comme une tornade [ … ] Une violente dispute éclate pendant que je monte [ … ] une paire de pique-cierges que Claude a achetée chez un antiquaire. Il en prend un qu’il lui jette au visage. Elle l’évite et l’objet termine sa course folle contre le mur en laissant une trace bien visible ». Paniquée, France Gall aurait pris la fuite, avant de se faire poursuivre par l’artiste, furieux.

« J’essaye de [le] ramener à la raison [ … ] mais mon intervention n’a que peu d’effet. Claude s’engouffre dans la Mustang et je le suis. Le bolide slalome entre les piquets prévus pour l’installation du marché. Devenu fou, il cherche à la renverser. Je tire sur le volant pour lui éviter de commettre l’irréparable ». Intervention réussie : France Gall s’enfuit dans la nuit. Après ce clash, elle prend la décision de le quitter, à tout jamais.

« Ce qu’il y a de réjouissant c’est qu’elle a fini par le quitter. Non pas en claquant la porte, mais avec indifférence », explique Bertrand Dicale, spécialiste de la chanson française. « Claude François dira plus tard à quel point c’est horriblement blessant d’avoir une femme qui est indifférente à vous ». Une rupture qui inspirera la célèbre chanson Comme d’habitude.

Quand Claude François meurt en 1978, les deux artistes n’étaient pas en très bons termes. Alors bien sûr, France Gall lui avait pardonné, mais elle gardait en elle une certaine rancœur … Quand elle a visionné le biopic sur la vie de Claude François, elle n’a pas aimé son personnage, mais a reconnu à quel point le portrait de l’artiste était lui, réaliste : « Je ne me suis pas reconnue. Mais en revanche sur Claude c’était assez approchant. On n’est pas touché quand il s’en va parce qu’il est tellement odieux pendant deux heures … c’est délicat de faire des films sur les gens. Mais enfin Claude était quelqu’un de pas facile. Personne n’était heureux autour de lui ».

« Quand j’ai rencontré France Gall, j’ai compris que mon cœur était cicatrisé, qu’à nouveau j’étais capable de dire « Je t’aime » à une fille, que le souvenir de Janet ne viendrait plus jamais hanter mes nuits. Avec France, cela dura un peu plus de trois années, trois merveilleuses années qui marqueront ma vie. Ça a été que de l’amour, c’était de la passion. On s’est aimés puis déchirés, puis quittés, puis aimés à nouveau. Notre amour était comme la foudre de l’orage, zébré d’électricité, en dents de scie, avec des hauts et des bas. » Claude François

L’Eurovision, entre joie et désillusion

Le 20 mars 1965 : une jolie jeune chanteuse, prénommée France Gall, monte sur la scène de l’Eurovision. Ses cheveux blonds sont parfaitement coiffés, coupés au carré et domptés à coups de laque, aucun cheveu ne dépasse. Elle porte une petite robe blanche, et son sourire est juste charmant. Elle semble un peu anxieuse, mais pourtant, elle va assurer sa prestation à la perfection. Une étoile est en train de naître sur la scène internationale, mais à cet instant précis, personne ne le sait. Car la chanteuse ne fait absolument pas partie des favorites …

Nous sommes à Naples, et France Gall représente le Luxembourg lors de la finale du concours. Mais déjà, lorsqu’elle monte sur scène, ses pensées sont ailleurs. Elle est tourmentée par les hauts et les bas que lui valent cette participation … Certes, elle est fière, et elle sait qu’il peut s’agir d’un formidable tremplin pour sa carrière, pourtant, le prix à payer est tellement cher … Comment avoir l’esprit apaisé? Du haut de ses 17 ans, elle a vécu une après-midi particulièrement compliquée. Et pour cause, lors des répétitions, elle a été huée par les musiciens, qui ont vivement critiqué sa prestation. Elle a même entendu certaines personnes se plaindre de sa voix, et du fait qu’elle n’était « pas dans le rythme ». On la dévisage, on la contemple comme si elle n’était pas à la hauteur de l’événement. Comme si la chanson qu’elle interprète, Poupée de cire, poupée de son, n’était pas assez bien pour l’Eurovision. Les autres participants ne sont pas tendres avec la jeune fille en fleurs … Bien sûr, les rivalités sont la marque de fabrique de tous les concours, mais la jeune France Gall était loin d’imaginer le panier de crabes dans lequel elle allait être jetée. Entre les regards noirs, les bousculades, et les moqueries durant les répétitions, France Gall prend cher. Pourtant, lorsqu’elle monte sur scène ce soir-là, elle rassemble toute son énergie et livre une performance rayonnante. Son titre Poupée de cire, poupée de son, écrit par Serge Gainsbourg, est un carton. Dans la salle, l’ambiance est survoltée. La jeune artiste assure, l’ œil pétillant, et semble jouer avec la caméra. Et c’est ainsi qu’à la surprise générale, elle remporte le concours ! Une fois sortie de scène, elle se dirige vers les coulisses pour appeler l’homme qu’elle aime follement, Claude François. Elle n’a qu’une hâte : partager avec son amoureux sa victoire, et sa joie. Hélas pour elle, elle va tomber de très haut… Au téléphone, ce dernier est glacial. Il lui annonce, avec une cruauté implacable, qu’il la quitte. Ironie du sort, le jour où elle devient une star internationale, son compagnon met un terme à leur histoire d’amour.

Face à Stéphane Bern, des années plus tard, France Gall racontera à quel point l’expérience fut douloureuse. L’après-midi fut terrible, teintée de jalousies, de la part des candidats, et de mépris, de la part des musiciens, mais s’est aussi soldée par sa rupture avec Claude François. Mais il n’y a pas que cela … Car en coulisses, France Gall s’est fait plusieurs ennemis pendant le concours. Certains lui vouaient une haine si féroce qu’ils n’ont pas hésité à lui faire vivre le pire. Des moqueries, mais aussi, des coups. Enfin, un coup. France a en effet été giflée par la candidate qui a décroché la deuxième place du podium : « La concurrente anglaise a été très déçue car elle devait gagner. D’après elle et tout le monde. Finalement, c’est moi qui l’ai eu et je m’en fichais complètement. J’ai le souvenir d’une gifle … Elle croyait qu’elle allait gagner. Tout le monde croyait que c’était elle. On a même dit que cela avait été truqué ».

Années 70 et 80

Pour France Gall, c’est parti pour une tournée d’été de plusieurs mois. Un nouveau défi qui lui met du baume au cœur. Elle va sillonner les routes françaises avec le Cirque de France, et partir à la rencontre de son public. De quoi lui réchauffer le cœur, un cœur brisé par Claude François … Une autre nouvelle lui apporte beaucoup de bonheur : elle va partager cette nouvelle étape de sa vie que représente cette tournée avec son frère, Philippe. En effet, ce dernier – dont elle est très proche – remplace le bassiste de l’orchestre ! La jeune chanteuse est rassurée de savoir que son pilier est à ses côtés, et ses parents aussi.

Les succès s’enchaînent pour France Gall, qui devient incontournable. Sa collaboration avec Gainsbourg lui permet d’enchaîner les hits, notamment avec Attends ou va-t’en, Nous ne sommes pas des anges, ou encore L’Amérique. En 1966, elle est présente à la Villa Louvigny, à Luxembourg, pour assister au Grand Prix Eurovision de la chanson européenne. Après tout, c’est elle qui a remporté la saison précédente, et justement, pour appeler le vainqueur, l’orchestre qui l’avait tant critiquée l’année précédente entonne la chanson Poupée de cire, poupée de son, le titre qui a fait d’elle une star internationale. Un gros plan du visage radieux de France Gall sera réalisé, et c’est elle qui viendra remettre la médaille du Grand Prix au gagnant autrichien, Udo Jürgens, qui chantait Merci, Chérie.

1966 démarre sur les chapeaux de roues pour France Gall, qui multiplie les concerts. C’est l’heure d’un nouveau tube pour la baby-doll, qui justement va chanter le texte de Gainsbourg Baby Pop. Au début, elle y est allergique. Elle le trouve brutal. Mais finalement, son entourage la pousse à accepter cette chanson … Qui y verra la noirceur des paroles chantées, lorsqu’elles sortent de la bouche de France Gall, adolescente de 18 ans, blonde et ingénue ? C’est aussi l’année de la publication de « la photo du siècle », sur laquelle figurent 46 vedettes des années yéyé. Quelle consécration !

Dans ce spectacle télévisé qui s’inscrit dans la mouvance psychanalytique du dernier film de Fellini, France incarne une jeune fille en fleur, qui va venir troubler le chanteur yéyé italien, Gianni Morandi. Cette époque est aussi celle du scandale des « sucettes », et forcément, dans le film elle incarne « La Grâce » qui chante cette chanson provocatrice aux côtés de Christine Lebail qui est « La Pureté ». Des interprétations contradictoires qui ne laisseront pas France Gall indemne lorsqu’elle réalise qu’elle a été manipulée dans un but médiatique, elle qui a juré jusqu’à sa mort n’avoir jamais lu le double sens des sucettes …

Hélas, ce scandale n’est que le début d’une longue série. Impossible pour les détracteurs de la chanteuse de penser qu’elle n’était pas au courant du double sens de la chanson de Gainsbourg ! Et comme ses prochains disques sont aussi du compositeur, tous sont suspectés de porter des messages peu glorieux, aux visées mercantiles. Sa chanson Bonsoir John-John lui sera aussi reprochée …

Puis vient l’heure de son duo avec Maurice Biraud, pour La Petite. De quoi éclipser l’aura de Serge Gainsbourg qui, visiblement, ne lui allait pas si bien. Le 45-tours suivant va être enregistré avec David Whitaker, compositeur anglais à la renommée internationale. De nouveaux auteurs comme Frank Thomas et Jean-Michel Rivat viennent rejoindre son équipe. Au même moment, sa collaboration avec Serge Gainsbourg est sur le déclin. Ensemble, ils vont sortir le titre Teenie Weenie Boppie, qui sera un véritable flop.

France Gall va nouer un lien particulier avec l’Allemagne. Une sorte de terre d’accueil où elle se sent heureuse et apaisée ! Elle s’enferme en studio pendant des semaines, entourée de ses nouvelles équipes. On retrouve notamment le grand compositeur et orchestrateur Werner Müller, mais aussi des vedettes comme Heinz Buchholz ou le compositeur de musiques de films Giorgio Moroder. C’est une nouvelle époque pour France Gall, un nouveau départ pour celle qui avait l’impression que sa carrière était définitivement en stand-by en France … Elle se met donc à chanter, en allemand, les titres suivants : Hippie, hippie (1968), Ich liebe dich, so wie du bist (1969) et Mein Herz kann man nicht kaufen (1970), mais aussi de nouvelles chansons telles que Haifischbaby (Bébé requin), Die schônste Musik, die es gibt (Music to Watch Girls By), Was will ein Boy(1967), LikeMozart(1969), Komm mit mir nach Bahia, Miguel (1972).

Il faut dire que sur ce point, France Gall a vu juste : du côté de l’Hexagone, c’est le néant. Elle qui jouissait d’une si grande renommée, ne fait plus parler d’elle.

Elle ne vend plus non plus. Avec Serge Gainsbourg, l’association si lucrative, la « machine à tubes », ne fonctionne plus. Mais si elle est triste de clore cette page, elle sait qu’il est grand temps. Et l’affront des « sucettes » lui est resté en travers de la gorge … Il faut dire que les mises en scène, particulièrement provocatrices, voire corrosives, de Jean-Christophe Averty, qui lui a notamment fait mener un troupeau d’hommes à quatre pattes pour illustrer sa chanson J’ai retrouvé mon chien, ne vont pas arranger les choses. Cette prestation livrée durant l’émission Les Raisins Verts provoque un scandale. Encore un. À ce sujet, France Gall confiera dans les colonnes des Inrockuptibles qu’elle a souvent été dépassée par les désirs de ceux qui tiraient les ficelles de sa carrière. Regrettant ne pas avoir, plus souvent, fait entendre sa voix.

« Mon personnage s’est parfois retrouvé transformé par les gens avec lesquels je travaillais. Je pense notamment à une émission de télé où je chantais J’ai retrouvé mon chien. Jean-Christophe Averty avait imaginé une mise en scène ahurissante où j’étais debout, en jupette, avec trois laisses à la main et, au bout des laisses, il y avait des vieillards et des clochards à la place des chiens. Dans le monde prude de la télé de l’époque, ça a provoqué un scandale incroyable ! » France Gall.

La future compagne de Julien Clerc (nous y sommes presque) mise beaucoup sur sa carrière en Allemagne et sur son association avec David Whitaker. Aux côtés de ce dernier, elle enregistre un second 45-tours, avec une nouvelle œuvre du trio Thomas, Rivat et Dassin, Toi que je veux. Hélas, là encore, c’est un flop. Et même si les arrangements de sa Chanson Indienne sont reconnus par le public et salués par la critique, cela ne suffira pas à sauver le disque de la chanteuse, qui commence à sérieusement déprimer de ne pas voir sa carrière décoller …

Pour son nouveau disque, France Gall retrouve Alain Goraguer. À ses côtés, elle espère renouer avec le succès. C’est le temps des titres jazzy : Le temps du Tempo, Daddy Da Da, La vieille fille ou encore Allo Monsieur là-haut. C’est aussi l’heure de Mai 68, qui va balayer ses musiques d’un revers de main … Pour ne pas vivre ces événements, l’artiste quitte Paris : « Qu’est-ce que j’ai pu avoir eu peur. Au début, je n’éprouvais qu’une certaine irritation. À cause des batailles du Quartier Latin et des grèves, voilà que la sortie de mon nouveau super 45-tours était compromise. Moi qui avais tant travaillé pour qu’il soit réussi. Et à l’irritation a succédé la peur. Une peur carabinée. » France Gall

À 21 ans, France Gall profite de sa majorité pour affirmer ses propres choix. C’est le moment de l’arrivée à échéance de son contrat chez Philips. La jeune chanteuse a désormais quelques années de carrière derrière elle : elle sait ce qu’elle veut, et ce qu’elle ne veut plus. Terminé de faire plaisir aux autres, ou d’incarner un personnage qui ne lui colle pas à la peau … France Gall a envie d’être elle-même. De chanter des chansons qui lui plaisent. D’arrêter de jouer la carte de la provocation à toutes les occasions. C’est la fin de sa collaboration avec Philippe Bourgeois. Et le début de nouvelles aventures. La jeune chanteuse croit beaucoup aux nouvelles collaborations et aux nouveaux projets qu’elle a en tête.

Début 1969, elle enregistre un titre pour une nouvelle maison de disques La Compagnie. Cette chanson est née de l’association d’artistes comme Hugues Aufray, Michel Colombier ou encore Nicole Croisille. Seulement voilà, la longue traversée du désert n’est pas terminée pour France Gall. Les enregistrements de qualité se mêlent aux pires … Elle s’égare dans des projets hasardeux. Et comme elle le confiera à Platine Magazine, des années plus tard, ce creux de la vague sera très dur à digérer :

Platine: Vous avez souffert de ce creux de la vague ?

France Gall: Qu’est-ce que je n’étais pas bien ! C’est assez angoissant à vingt ans de ne pas avoir d’argent quand on en a eu beaucoup à seize.

Platine : La Compagnie, c’était une galère?

France Gall : Galère, c’est le mot ! Hallucinant. Je suis même allée au festival de Sanremo défendre L’Orage avec Gigliola Cinquetti. Là, j’ai même chanté avec “Little” Stevie Wonder. Je me souviens avoir été très mauvaise ».

Au même moment, une sombre nouvelle vient lui donner le coup de grâce : la faillite de sa maison de disques, La Compagnie. Elle devient la spectatrice assidue de la comédie musicale Hair, où Julien Clerc tient le premier rôle. Elle s’amourache du chanteur en vogue, et les deux se lancent dans une belle histoire d’amour. Seulement voilà, il est bien difficile pour France de vivre aux côtés de cet homme dont la carrière est en pleine ascension, et qui connaît la gloire, alors qu’elle, est en pleine traversée du désert médiatique, et qu’aucun oasis ne semble poindre à l’horizon. Souffrant de cette trop grande différence entre eux, ne supportant plus d’être dans l’ombre de l’homme qu’elle aime, elle finit par le quitter. Leur séparation lui inspire la chanson Souffrir par toi n’est pas souffrir (1975).

Nous sommes en 1971 et France Gall est la toute première artiste à enregistrer en France pour un label américain, Atlantic. De prestigieux auteurs accompagnent France Gall, comme Jacques Lanzmann, mais cela ne suffit pas : le succès n’est toujours pas au rendez-vous. Désespérée, France Gall se tourne de nouveau vers Gainsbourg. Il fut un temps où leur duo raflait les premières places de tous les podiums, peut-être qu’il est la clé qui lui permettra de retrouver sa place au cœur de la lumière ? Il lui écrit Frankenstein, qu’elle enregistre pour Emi-Pathé: encore un flop. Ses prochaines collaborations se feront alors avec Jean-Michel Rivat en tant que directeur artistique, 5 minutes d’amour et La quatrième chose. Deux échecs commerciaux. Il en va de même pour les musiques : Par plaisir et Plus haut que moi. Pour renflouer les caisses, elle participe avec son frère Patrice à un roman-photo pour Télé-Poche.

Au printemps 1973, alors qu’elle circule dans les rues de Paris au volant de son Austin, France Gall est frappée par la musique qu’elle entend. Elle adore la mélodie, la voix, les paroles … Absolument tout ! Elle est comme subjuguée par ce titre Attends-moi, de Michel Berger.

Ils se rencontrent, suite à une émission de radio, mais pour lui, il n’est pas question d’une collaboration entre eux. La suite, vous la connaissez … Musicalement parlant, la collaboration entre France Gall et Michel Berger est le nouveau souffle qu’il manquait à l’artiste. La déclaration d’amour voit le jour en 1974. Le premier succès d’une longue liste pour le duo Gall & Berger.

« J’attendais tellement de cette première fois que quand il m’a joué la chanson au piano, j’ai été … comment dire … un peu déçue. Je rêvais d’une chanson rythmique, et me voilà avec une sensuelle déclaration. Le jour du studio, j’étais un peu tendue. Mais après une ou deux prises, Michel était content. Dans la foulée, il m’a demandé d’écrire un texte parlé sur la piste de la fin, comme si j’avais fait ça toute ma vie. Il s’est rendu compte qu’il manquait un solo de guitare à deux heures du matin. Effondré, il ouvre la porte du studio et croise un guitariste qui travaillait à côté et rentrait chez lui. En un quart d’heure, la guitare de Jean-Pierre Chatelain s’imprimait sur la bande seize pistes où le piano de Michel donne à lui seul le balancement bien particulier de la chanson. Premier cadeau. Le public a été là tout de suite ».

C’est ainsi que, après 12 ans de carrière et une longue traversée du désert, le premier album studio de France Gall sort dans les bacs. Cette dernière est folle de joie, très excitée par cet album qui, pour elle, est le symbole d’une véritable renaissance.

En guise de cadeau de mariage, elle devient l’héroïne de la comédie musicale Émilie ou la Petite Sirène, écrite par Michel Berger. Un mois plus tard, c’est le succès de Ça balance pas mal à Paris. Un mariage, deux enfants, Pauline et Raphaël, et le temps du bonheur. Maman, épouse comblée, France Gall reprend goût à la scène, elle s’épanouit et est de plus en plus heureuse. Le spectacle Made in France est un carton. C’est l’heure de Starmania, d’ Il jouait du piano debout, et de l’album Paris, France, qui va faire danser tout le pays durant l’été 1980. C’est aussi l’heure de sa collaboration avec Elton John, et des titres Donner pour donner, et Les aveux.

En 1981, c’est la sortie de l’album Tout pour la musique, puis en 1982, la série de concerts au Palais des Sports de Paris. Trois semaines, à guichets fermés, durant lesquelles France Gall va présenter un show haut en couleur, rythmé par les mélodies entraînantes qui sont désormais des standards de la musique française.

Son histoire d’amour avec Julien Clerc

Pas facile de rester à la page quand les modes en matière de musique changent constamment. France Gall s’en est rapidement rendu compte pour en avoir fait les frais très jeune, mais, heureusement pour elle, cette dernière a été sauvée par l’amour. En effet, alors qu’elle subissait en France le double sens de la chanson que lui avait écrite Serge Gainsbourg : Les sucettes, la starlette des années yéyé a pris la décision de s’expatrier en Allemagne pour tenter diverses collaborations. Ainsi, de nombreux artistes de renom tels que Joe Dassin, Étienne Roda-Gil ou encore le célèbre parolier Jacques Lanzmann se sont essayé à produire un nouveau bit avec la belle France. Pourtant, rien de ce qu’ils ont pu sortir avec la chanteuse n’a marqué les esprits sur le moment. En 1969, alors que la carrière de l’artiste est au plus bas, elle assiste au spectacle Hair et tombe tout de suite sous le charme d’un beau ténébreux à la voix envoûtante. Cet homme ? C’est Julien Clerc, qu’elle arrive à séduire sans trop de difficulté. Ainsi, leur union est révélée par le magazine Salut les copains, au mois de décembre de la même année.

Pourtant, bien plus tard, l’interprète de Femmes je vous aime avait avoué dans Gala : « Nous étions jeunes. J’étais un peu inconscient, en ce temps-là … Je ne faisais pas vraiment attention à sa carrière [celle de France Gall]. Moi, je traçais ». Et pour cause, sa carrière était en pleine ascension. C’est sans aucun doute ce qui a sauvé la mise à la sublime blonde, gagnante de l’Eurovision en 1965, que les Français étaient en train d’oublier. En effet, le couple glamour qu’elle formait avec Julien Clerc lui a permis de redevenir le centre de l’attention des médias, notamment grâce aux nombreux shooting photo. Sur les conseils de ses managers, Babou – comme ses fans aiment l’appeler – reste ainsi près de cinq ans dans l’ombre du chanteur et vit de plus en plus mal la situation, qui devient, au fil des années, littéralement invivable. En effet, pour assister aux concerts de son beau brun ténébreux, cette dernière en était arrivée à porter des perruques pour ne pas déplaire aux fans féminines du chanteur.

France Gall se sépare de Julien Clerc en 1974. En 2018, l’actuel directeur des programmes de la chaîne Melody, Jean-Pierre Pasqualini, s’est exprimé sur le sujet sur BFMTV et expliquait : « France Gall le quitte, c’est elle qui s’en va. Elle est un peu lassée, mais elle a eu l’élégance de ne jamais le lui reprocher », avant de poursuivre : « Elle voulait qu’il lui écrive des chansons et il ne l’a pas fait. Elle voulait plus … » Le journaliste, spécialiste de la période yéyé, qui a vu en direct l’ascension de France Gall avait confié qu’un an et demi après leur rupture, Julien Clerc ne semblait toujours pas avoir digéré leur séparation : « Il a beaucoup souffert. En 1975, il a écrit la chanson Souffrir par toi n’est pas souffrir avec un album noir. Il a très mal vécu le départ de France Gall » tandis que de son côté, la jeune femme avait déjà trouvé refuge dans les bras de celui qui fut son mari pendant près de 16 ans, Michel Berger.

Après la disparition de France Gall, survenue le 7 janvier 2018, Julien Clerc avait tenu à lui laissé un message, traduisant encore, après toute ces années, l’amour et la tristesse qu’il ressentait pour celle qui fut sa compagne pendant six ans : « France, nous avions 20 ans, des bonheurs, des chagrins. Une part de ma vie s’en va avec toi. Julien ».

Michel Berger, le grand amour d’une vie !

Il y a certaines choses qui ne s’expliquent pas ! Parfois, on croise la route d’une personne et on sait, au fond de nous, qu’elle nous est destinée. Alors forcément, ce n’est pas toujours évident des deux côtés, sinon, ce serait trop simple. Mais c’est ainsi que la vie est faite ! Souvent, il faut se battre pour obtenir ce que l’on veut. Et c’est exactement ce qui est arrivé à France Gall ! En effet, lorsque la chanteuse rencontre Michel Berger pour la première fois, elle est comme foudroyée. Cupidon lui a décoché sa flèche en plein cœur. Cette rencontre a lieu en 1966, alors que la starlette traverse une période difficile … Sa carrière est au point mort après les nombreux succès qu’elle a connus dans les années 60, et elle vit terriblement mal d’être le fait d’être dans le creux de la vague. C’est alors qu’elle rencontre Michel Berger, lors d’une séance photo pour le magazine Salut les Copains, avec Jean-Marie Périer. Timide, elle reste en retrait, l’observe et l’écoute parler, envoûtée par son charme naturel. Elle connaît ses qualités d’auteur-compositeur, elle rêve même de travailler avec lui, mais elle ne pensait pas que l’homme était aussi séduisant.

Pourtant, elle ne cherche pas à l’aborder, ni à se démarquer des autres filles présentes ce jour-là. Non. Elle se contente de l’épier du coin de l’œil, discrètement, comme le ferait une adolescente qui vit son premier coup de foudre … Et elle va agir de la même façon lorsqu’elle va le croiser pour la deuxième fois dans les coulisses d’une émission télévisée. Pourtant, cette fois-là, elle se fait la promesse que lorsqu’elle le reverra – et elle sait pertinemment qu’elle va le revoir -, elle ira le voir. C’est exactement ce qu’elle va faire lors du dîner organisé par la maison de disques WEA ! Ce soir-là, elle s’est faite belle afin qu’il ne voit qu’elle. Et lorsqu’elle l’aperçoit au bar, elle prend une profonde inspiration, et va le rejoindre pour lui demander de lui écrire une chanson. Manque de chance, Michel Berger n’est pas du tout intéressé! Il décline poliment en souriant, et fuit la conversation. Oui, mais voilà, France Gall sait ce qu’elle veut, et ce qu’elle veut, c’est lui. Et sur tous les points !

Déterminée, France Gall ne va rien lâcher et va même réussir à obtenir ses coordonnées personnelles. « À ce moment précis, France ne veut pas lâcher l’affaire. Elle demande à son manager, Bertrand de Labbay, de contacter directement Michel Berger et d’essayer de le convaincre. Ce dernier lui explique que Michel Berger n’a pas l’habitude d’écrire juste une chanson pour un artiste. Quand il écrit, c’est généralement pour un album entier ! Mais France n’a rien voulu savoir, elle le voulait désespérément », écrit Pierre Pernez dans son livre France Gall : Comme une histoire d’amour. Et puis, un jour, le chanteur se décide à écouter ses maquettes ! Hélas pour France, c’est la douche froide. Michel Berger n’aime pas du tout son timbre de voix et sa façon un peu niaise de s’approprier les chansons qu’elle chante. En apprenant que ses maquettes ne l’ont pas du tout touché, France Gall est blessée, abattue … Pourtant, une fois de plus, elle va redoubler d’efforts et ne va pas baisser les bras. Elle va tout faire pour que l’auteur-compositeur ne l’oublie pas, multipliant les attentions à son égard. Une détermination dont l’écrivain Alain Wodrascka va parler dans son livre Douce France, paru en octobre 2015 : « Quand un peu plus tard elle a vu Michel Berger à la télévision, elle a dit à un ami : « J’aurai ce mec et j’aurai ses chansons ». Elle a aussi assuré à Véronique Sanson : « Je m’occuperai de sa maison et je lui ferai des enfants » ! Quelques semaines après que l’interprète du Paradis Blanc l’a envoyé paître, France lui fait livrer des croissants de chez Fauchon, par une belle matinée ensoleillée. Sous le charme, il la rappelle, et lui propose un dîner. C’est le début du binôme Gall & Berger, puisque de là, il ne se quitteront plus jamais.

Michel Berger et France Gall forment désormais un couple. En 1974, elle va poser sa voix sur l’une des chansons du nouvel album de son compagnon Mon fils rira du rock’n’roll. De là, elle lui demande un service : elle ne veut plus une chanson, elle veut qu’il la fasse renaître. Après avoir longtemps refusé de travailler avec elle, Michel lui écrit La déclaration d’amour. Le premier succès d’une longue liste ! Seulement, ça, France ne le sait pas encore, et elle est bien loin de s’en douter. Car lorsqu’elle découvre la chanson, elle est terriblement déçue … « Premier disque, première chanson. J’attendais tellement de cette première fois que quand il m’a joué la chanson au piano, j’ai été … comment dire … un peu déçue. Je rêvais d’une chanson rythmique, et me voilà avec une sensuelle déclaration. Le jour du studio, j’étais un peu tendue. Après une ou deux prises, Michel était content. Dans la foulée, il me demande d’écrire un texte parlé, comme si j’avais fait ça toute ma vie, écrire » ! Finalement, France suit les conseils de Michel et ensemble, ils vont écrire et boucler ce titre afin qu’il soit parfait. Finalement, ils vont se découvrir une complicité artistique qu’ils n’auraient jamais imaginée. Désormais, ils feront équipe aussi bien à la vie qu’en studio ! C’est ainsi que le 6 janvier 1976, après 12 ans de carrière, France Gall sort son premier album studio : France Gall ! Lors d’une interview avec le journaliste Richard Cavanno, la blonde est surexcitée, consciente qu’en réalité, il s’agit là du début de sa carrière. Sa véritable carrière. « C’est mon premier album ! C’est un truc énorme pour moi. La première fois que j’aime ce que je chante, et la manière dont je le fais » ! Réponse du journaliste : « Effectivement, ce premier album, c’est une manière d’effacer définitivement la France Gall des sixties : on est passé à autre chose. » !

Ça y est, France Gall est enfin reconnue comme une artiste à part entière, et plus comme une midinette des années 60.

Et ce succès, elle le doit à l’amour de sa vie, celui qui l’a fait renaître, Michel Berger ! Et elle s’apprête à vivre un des plus beaux moments de sa vie, puisque le chanteur lui a demandé de devenir sa femme ! Comme cadeau prénuptial, il consacre son Numéro 1, diffusé le 22 mai 1976 sur TF1, à l’écriture d’une comédie musicale, « Émilie ou la Petite Sirène 76 ». Et qui est l’héroïne de ce show ? France Gall, évidemment : « C’est la date de cette émission qui a déterminé la date de notre mariage un mois plus tard », confiera-t-elle en interview quelques semaines après la diffusion. À cette époque, il forme le duo du succès de l’été, Ça balance pas mal à Paris, et ils se marient le 22 juin à la mairie du 16e arrondissement ! Une cérémonie intimiste, où le couple sera entouré de ses proches, et durant laquelle le soleil sera au rendez-vous : « Il a fait très beau ce jour-là, tout le monde avait le sourire. C’était une vraie belle journée où l’amour était au rendez-vous. France Gall rayonnait de bonheur » ! Au programme de ce mariage entre ces deux stars que tout opposait ? Dîner dans un petit restaurant de la capitale privatisé pour l’occasion, avant de terminer la soirée au domicile du couple. En 1978, France Gall devient la maman de Pauline. Raphaël, lui, pointera le bout de son nez quatre ans plus tard.

Toujours sous la houlette de son mentor et mari, Michel Berger, France Gall reprend goût à la scène qu’elle avait abandonnée. Grâce à lui, elle a de nouveau confiance en elle. Alors, elle monte de nouveau sur les planches du Théâtre des Champs-Élysées pour un spectacle intitulé Made in France. En 1979, c’est un spectacle inédit auquel elle participe dans le rôle de Cristal, l’opéra rock Starmania ! Un pari risqué puisqu’à cette époque, ce genre de spectacle qui cartonne pourtant outre-Atlantique, est boudé par le public français. Pourtant, la chanteuse fonce. Ce spectacle a été composé par Michel Berger, et écrit par Luc Plamondon, et elle a entièrement confiance en ces deux hommes de talent. Et elle a raison puisque Starmania va rester graver dans les annales, et est encensé par toutes les critiques de presse du moment. Le bouche-à-oreille fonctionne tellement qu’un mois plus tard, le show est présenté pendant un mois au Palais des Congrès de Paris. Les shows se jouent à guichets fermés, et les ventes des disques sont hallucinantes.

Une fois de plus, France Gall est couronnée de succès grâce à Michel Berger. Pour eux deux, c’est le début d’un tout ! Les tubes s’enchaînent : Résiste, Si maman si, La groupie du pianiste, Évidemment, Ella, elle l’a, Babacar, Il jouait du piano debout … En 1980, le couple enregistre avec Elton John Donner pour Donner, un titre qui fait le tour du monde ! Leur carrière commune est désormais lancée à l’international. Tout ce qu’ils touchent ensemble se transforme en or. Le couple nage en plein bonheur.

France Gall et Michel Berger vont vivre leur premier coup dur au début de l’année 1982. À cette époque, ils sont en couple depuis huit ans, et vivent une histoire sans fausse note. Mariés, ils sont les heureux parents de Pauline et de Raphaël, et sont tous les deux à l’apogée de leurs carrières. Michel chante et compose pour les plus grands, pendant que France Gall se produit au Palais des Sports dans un spectacle époustouflant conçu par Michel Berger Résiste. Pour ce show d’une autre dimension, Michel a fait appel à son frère, Bernard, qui est architecte, lui demandant de réaliser de vraies prouesses techniques pour que sa femme soit magnifiée par le spectacle. Avec son frère Bernard, Michel a une relation véritablement fusionnelle ! Bernard souffre d’une terrible maladie : la sclérose en plaques. Hélas, au moment où France triomphe, Michel vit un terrible drame puisqu’il perd ce frère tant aimé. La chanteuse va alors voir son mari plonger dans une profonde dépression, alors qu’elle n’a qu’une envie: partager son bonheur avec lui ! Mais elle le sait, ce serait déplacé. Alors, elle essaye d’être forte pour deux, gérant le spectacle, les enfants, et faisant tout son possible pour l’épauler dans ce moment si difficile.

Après le Palais des Sports, ils décident de partir en famille à la montagne. Ils ont désespérément besoin de se retrouver, loin du tumulte parisien et de la pression des médias. Tout est parfait, Michel semble reprendre du poil de la bête. France est heureuse de voir son homme sourire à nouveau. Seul hic ?

La toux de Pauline, qui semble durer depuis plusieurs semaines. Alors, à leur retour, ils décident de consulter un médecin généraliste, pour être rassurés. Malheureusement, le ciel va leur tomber sur la tête lorsque le praticien va lâcher ce terrible diagnostic : la petite fille de 4 ans souffre de la mucoviscidose ! Le couple est abattu, sous le choc … Cela ne peut pas être possible !

Michel décroche alors le téléphone et contacte son père, le grand professeur Jean Hamburger. S’il y a quelqu’un qui peut aider Pauline, c’est bien lui ! Hélas, l’illustre médecin va réduire en cendres le peu d’espoir qu’il reste au couple : « Le seul véritable espoir pour Pauline serait que la médecine fasse de grands progrès dans les quinze ans à venir. » En clair : la maladie dont souffre leur fille est incurable et mortelle ! L’horreur absolue. Le couple décide alors de ne parler de cette maladie à personne, afin de ne pas être harcelé par la presse.

Dans les années qui vont suivre, le couple va petit à petit réduire le rythme des concerts, afin de profiter au maximum des moments en famille. Mais au bout de quelques années, France n’y arrive plus. Elle ne peut plus perdre de temps en studio, en promo, ou sur scène. Sa fille est malade ! Et elle ne veut pas perdre une miette du temps qu’il lui reste avec elle. En 1988, alors que la petite Pauline a 10 ans, France décide d’arrêter de chanter. De son côté, Michel opte pour une autre thérapie : se plonger dans la musique afin de trouver la force de rester debout. Ils s’éloignent peu à peu l’un de l’autre, jusqu’en 1992 où ils décident de renaître, ensemble, en réalisant un nouvel album à deux. Ils se jettent à corps perdu dans ce projet, symbole de renouveau.

Dimanche 2 août 1992, à Ramatuelle. Il fait beau, il fait chaud, c’est une belle journée d’été comme on les aime dans la région. Depuis quinze jours, France Gall et Michel Berger sont en vacances dans leur maison de Provence. Les enfants, eux, sont à la montagne. Après l’enregistrement de leur album Double Jeu, le couple a ressenti le besoin de se retrouver à deux, parfois avec quelques amis. C’est le cas ce jour-là. Après avoir déjeuner sur la terrasse d’un petit restaurant qu’ils adorent, ils sont rentrés à la maison. En fin de journée, Michel descend au court de tennis, dans le jardin, afin de faire une partie avec deux amies. Le malaise qu’il a eu quelques semaines plus tôt n’est plus qu’un lointain souvenir, il préfère ne pas y penser, et ce, même si son père, médecin de renom, lui a donné une ordonnance afin qu’un confrère cardiologue l’examine. Oui, mais voilà, cette lettre, Michel l’a rangé dans un tiroir. Il s’en occupera à la rentrée. Pour l’instant, place au tennis ! Il est 18 h lorsqu’il se dirige vers le court pour échanger ses premières balles. Au bout de 45 minutes, il doit interrompre la partie. Une horrible douleur lui enserre le cœur. Il décide alors d’aller prendre un bain pour se détendre. Un peu d’eau chaude et de calme lui fera du bien. Il décide de ne pas inquiéter France Gall. Seulement voilà, pendant que cette dernière prépare le repas, elle entend hurler son prénom …

Elle se dépêche de rejoindre Michel, qui lui explique qu’il vient de nouveau de ressentir une douleur dans la poitrine. Inquiète, France appelle le médecin de garde. Quand ce dernier arrive, Michel est allongé sur le lit, France, à ses côtés. Elle pense à ce que lui a dit cette voyante croisée la veille, sur une petite plage de Saint-Tropez. Jamais jusque-là elle n’avait souhaité connaître les visions d’une diseuse de bonne aventure, mais cette fois, allez savoir pourquoi, elle s’était laissé faire. La bohémienne lui avait alors pris la main gauche avant de lui lancer: « Vous entrez dans l’immortalité … C’est pour maintenant. »

Le soir, elle avait raconté l’anecdote à Michel qui lui avait dit : « Elle pensait à toi ou à moi ? » France Gall secoue la tête et décide de ne plus penser à cette prémonition. Ce n’est pas le moment  ! Elle se dit qu’il ne faut pas s’inquiéter : après tout, son mari ne boit pas, ne fume pas, et ne fait aucun excès. Il n’a aucune raison d’être gravement malade ! Elle sort de ses pensées en entendant son mari parler au médecin : « Cela me serrait dans la poitrine, je ne veux pas re-souffrir comme ça » ! Ce dernier décide de prévenir SOS Médecin et le SAMU car il ne dispose pas du matériel nécessaire. Hélas, à peine a-t-il raccroché que Michel porte à nouveau la main à sa poitrine.

Le médecin se dépêche de lui faire une injection, mais il est trop tard. Michel est parti rejoindre le paradis blanc.

Michel Berger fut le plus bel amour de France Gall. Dans une interview accordée à Paris Match en 2012, à l’occasion des 20 ans de la mort de son mari, elle avait confié: « Nous avons eu une vie absolument magnifique, follement agréable, dans la fête, la réussite, le bonheur de la famille … C’était la perfection. Nous avons grandi ensemble, nous nous sommes élevés ensemble, nous avons construit notre vie ensemble. Nous étions différents, mais complémentaires » ! Même analyse du côté du compositeur Claude-Michel Schönberg, au micro de RTL : « France Gall a réussi à tirer de Michel le meilleur de lui-même. Et elle, a été la parfaite chanteuse pour ses œuvres, elle l’a beaucoup inspiré. Il y a tellement de chansons extraordinaires qu’il a écrites pour elle, c’est un phénomène formidable. Ils se sont aimés, et ont grandi ensemble ».

Dans la biographie de Michel Berger écrite par Yves Bigot, on découvre que celui-ci aurait entretenu une relation avec une mystérieuse Béatrice Grimm. Une relation, que France aurait toléré, priant chaque jour pour qu’elle prenne fin et qu’elle retrouve son mari. Cette femme mystérieuse, allemande et descendante des frères Grimm, aurait été mannequin et l’ancienne compagne de Timothy Dalton et de Billy Joel. Seulement voilà, personne n’a jamais réussi à retrouver sa trace ! En effet, à la mort de Michel Berger, elle aurait été écartée des obsèques par la famille et se serait volatilisée, emportant avec elle un album que Michel aurait écrit pour elle. Il se murmure pourtant qu’elle serait malgré tout venue incognito à l’enterrement, se tenant à bonne distance derrière les barrières, pour dire adieu à son compagnon.

En 2015, Fabienne Thibeault qui a connu le couple Berger-Gall, a confirmé l’existence de cette fameuse Béatrice Grimm : « À Ramatuelle, Michel tenait à rester au calme pour travailler avec Luc Plamondon et régler ses problèmes de couple avec l’avocat, avant de rejoindre Béatrice Grimm à Los Angeles où il devait préparer sa vie avec elle … » Même son de cloche du côté de Grégoire Colard, attaché de presse de Michel Berger pendant seize ans : « Michel soldait sa vie. Son couple avec France était au plus bas. Pendant tout l’enregistrement de Double jeu, ça allait au plus mal entre eux. Elle était tout à fait au courant de l’existence d’une autre femme. Michel finissait sa vie par une séparation. Il était très épris, mais ne savait pas comment s’y prendre. Il était en pleine dépression. » Seulement voilà, d’autres témoignages ne sont pas du tout en accord avec cette partie de l’histoire … Selon eux, oui, Michel a effectivement connu une autre femme à un moment de sa vie où il n’allait pas bien. Mais pour autant, il n’a jamais envisagé de quitter France Gall. C’est cette femme qu’il aurait quittée, en réalisant qu’il était sur le point de perdre France et que c’était la dernière chose qu’il voulait :

« S’il voulait vraiment la quitter, pourquoi aurait-il fait un nouvel album avec elle ? Pourquoi serait-il parti avec elle, cet été-là, à Ramatuelle? »

Le mystère reste entier, mais finalement, peu importe. Le duo restera à jamais gravé dans les mémoires de chacun comme l’un des plus beaux couples du milieu musical français.

La mort de Pauline, sa fille

La vie de France Gall a été ponctuée par de nombreux drames. Après la mort de Michel Berger, terrassé par une crise cardiaque après une partie de tennis, la chanteuse a dû faire face à la plus terrible des situations : enterrer sa fille. Pauline, la fille du couple avait en effet été diagnostiquée comme souffrant de mucoviscidose à l’âge de 4 ans … Et tout au long de sa vie, la chanteuse a vécu avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête, se demandant combien de temps Pauline allait vivre. Malheureusement, la jeune fille s’est éteinte à l’âge de 19 ans. L’horreur pour sa maman …

Lorsque la France apprend que Pauline est morte, le choc est immense. Il faut dire que personne ne savait. Personne n’était au courant de la maladie qui touchait l’enfant de ses deux immenses stars de la chanson française. Et pour cause : France Gall et Michel Berger ont tout fait pour que la mucoviscidose de Pauline reste secrète ! Il faut dire que lorsqu’ils ont découvert que leur fille était malade, le choc a été immense … C’était juste après leur série de concerts donnés au Palais des Sports. Afin de se ressourcer, ils étaient partis à la montagne avec leurs deux enfants. Le mot clé de ce voyage ? Simplicité et tranquillité. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes et la petite famille est ravie de se retrouver, au calme. Tout serait parfait, sans cette toux qui affecte Pauline. Une toux rauque, qui dure depuis plusieurs jours, et qui ne semble pas décidée à passer. Pourtant, Michel et France ne s’inquiètent pas plus que ça, et les vacances se terminent dans la joie et la bonne humeur. À leur retour, voyant que l’état de Pauline ne s’arrange pas, ils consultent tout de même un médecin généraliste afin d’être rassurés.

C’est là que le ciel leur est tombé sur la tête. Pensant qu’ils étaient déjà au courant du mal dont souffrait leur enfant de 4 ans, le praticien lâche sans grande précaution un mot terrible. Un mot qui va clouer France et Michel à leur fauteuil : mucoviscidose ! Choqué, Michel reprend vite ses esprits et file téléphoner à son père, le grand professeur Jean Hamburger. Hélas, ce que l’illustre médecin leur annonce anéantit les quelques espoirs auxquels se raccroche le couple : « Le seul véritable espoir pour Pauline serait que la médecine fasse de grands progrès dans les quinze ans à venir. »

Voilà ce que Michel entend, de la bouche de son père : la maladie de sa fille est incurable et mortelle ! C’est à ce moment précis que France et Michel vont sceller un pacte : afin que leurs deux enfants puissent continuer à vivre aussi normalement que possible et afin d’éviter la curiosité des badauds et des paparazzis, ils décident de garder le secret concernant la maladie de Pauline. Ce poids énorme, ils vont le garder pour eux, continuant à vivre comme si de rien n’était, et ce, jusqu’à la mort de Michel Berger, qui emportera ce secret dans sa tombe.

Dans un documentaire filmé pour C8, France Gall s’était confiée sur la disparition de Pauline, sa lumière. Même si elle y était préparée, jamais elle n’aurait imaginé devoir un jour imaginer sa vie sans son enfant : « On ne le croit pas, on n’en revient pas de vivre un truc pareil. On n’en revient pas de vivre ça, parce que c’est justement le truc que l’on ne peut pas et que l’on ne veut pas vivre. Tout le monde dit que c’est impossible et inhumain à vivre, et pourtant on me le fait vivre. Je n’en revenais pas que ça soit possible … » Et de poursuivre: « J’ai tout de suite voulu être la maman qui réussit le plus au monde à survivre et à intégrer cette idée d’avoir perdu un enfant. De pouvoir le plus facilement vivre avec ça, parce que sinon on est foutu si on y pense, si on est dans le regret ».

Sa thérapie à elle fut de lire tous les livres des auteurs qui avaient perdu leur fille … Comme un besoin de voir que d’autres avaient vécu la même douleur, et avaient survécu …

« Je ne me suis pas consolée de la même manière du départ de Michel et de celui de Pauline. Chanter m’a aidée, je me suis noyée dans la musique, le public. Pauline … non, ça m’a donné envie de me taire. Ça ne sert à rien de sortir, de se distraire. Ce n’est pas en étant dans la distraction que l’on va arranger les choses. Pour arranger les choses, il faut être dans le silence. Et accepter. Lire. Quand j’ai perdu ma fille, j’ai lu tous les auteurs qui avaient perdu leur fille. Ça m’aidait de savoir qu’on avait vécu la même chose et que les gens pouvaient en parler. Et Victor Hugo, par exemple, a écrit un poème là-dessus, sur son chagrin d’avoir perdu sa fille et sur comment, justement, il a repris vie. C’est vraiment un poème extraordinaire ».

Quand Pauline est morte, France Gall n’a plus eu envie de rien. Plus envie non plus de vivre dans le 16e ou le 7e arrondissement de la capitale, qui ont abrité tant de souvenirs familiaux. Alors, elle a décidé de s’isoler au Sénégal. Une terre dont elle était tombée amoureuse à la fin des années 1960 : « Je me suis beaucoup reconstruite dans cette maison perdue au milieu de la mer, sans électricité ».

Le Sénégal a toujours symbolisé l’idée d’un refuge. Cette terre, c’était la sienne. Et pour cause ! Au début des années 80, elle part en mission humanitaire avec Michel Berger et découvre ce pays méconnu. C’est le coup de foudre : le couple tombe littéralement amoureux de l’Afrique et de la petite île de Ngor, située à 17 km au large de Dakar. Alors, deux ans après ce premier voyage, ils décident d’y acheter une maison. Et dès que leurs emplois du temps respectifs le leur permettent, ils partent s’y ressourcer. Mais pas que ! Car France Gall et Michel Berger sont tous les deux de grands humanistes. Aider les autres ? Leur philosophie de vie ! D’ailleurs, ils n’ont cessé d’œuvrer pour aider la population locale, notamment en faisant construire une école.

Alors, quand cinq ans après la mort brutale de Michel Berger, France Gall a dû affronter la perte de sa fille, Pauline, elle n’est pas restée bien longtemps en France. Peu après les funérailles, elle est partie se réfugier dans cette maison qu’elle aime tant, afin de retrouver des forces. Et surtout, l’envie de vivre ! Des journalistes du Parisien ont d’ailleurs recueilli plusieurs témoignages de voisins et amis qui l’ont bien connue et côtoyée à cette douloureuse période de sa vie : « Elle me disait: « Je fais tout pour être là le 18 décembre, parce qu’ici, j’ai l’oxygène pour me ressourcer », explique Abdoulaye Diallo, avec qui elle avait créé l’association des Amis de Ngor: « Elle faisait énormément de bien autour d’elle tout en cachant que cela venait d’elle. Je crois que cela lui faisait du bien. C’était comme une thérapie », a raconté Maman Hawa, une vendeuse de bijoux et de fruits, proche de France Gall.

Pour France Gall, s’occuper l’esprit, aider son prochain, devient alors une nécessité … Seule, elle panse ses plaies en essayant de préserver son anonymat, souvent dissimulée derrière un grand chapeau et une paire de lunettes de soleil : « Elle fuyait les photographes et les touristes. Elle m’achetait des pulls à capuche qu’elle portait avec un chapeau pour passer inaperçue », se souvient Alioune Thiaw, un vendeur de tissus. Une information validée par un autre voisin, Joël Mornet: « Quand on était sur le pas de sa porte et qu’elle voyait des Blancs arriver, France fuyait. Elle tenait à sa tranquillité et préférait être avec des personnes d’ici. Elle appréciait la qualité des relations humaines. La gentillesse et la tolérance des gens de ce village. » !

Alors que la jeune femme avait seulement 19 ans, Pauline aurait émis un souhait avant de mourir. Elle était parfaitement consciente qu’elle allait mourir. Ses parents ne lui ont jamais caché la gravité de sa maladie, incurable, et elle a eu le temps de s’y préparer. Contrairement à sa mère. Mais quelle était la dernière volonté de Pauline ? C’est le producteur de musique, Bernard Saint-Paul, qui en avait témoigné dans l’ouvrage Quelque chose en nous de Michel Berger, d’Yves Bigot : « La petite Pauline Hamburger qui se sait condamnée, fait un testament et dit à sa mère : « Je sais que je vais mourir, je voudrais être enterrée à côté de papa ».

Bien évidemment, France Gall a tout mis en œuvre pour exaucer le souhait de sa fille chérie. Mais c’était sans compter sur la famille du chanteur de variété. Car le caveau familial des Berger contenait six places, déjà toutes prises … Pour que la petite Pauline soit enterrée aux côtés de son père, il fallait donc déplacer le défunt pour l’installer dans le caveau des Gall. Une guéguerre a donc débuté entre France, prête à tout pour respecter la dernière volonté de sa fille, et la famille Hamburger, qui refuse de déterrer Michel Hamburger, qui repose en paix depuis 1992. Vous imaginez … ? Une situation qui a pris une telle ampleur qu’elle a fini devant la justice. Vous connaissez la suite, le juge a tranché et c’est France Gall qui a finalement obtenu gain de cause.

Une femme engagée

Après avoir squatté pendant 36 semaines le classement du Top Album, avec Paris France et Débranche, France Gall est comblée. Imaginez un peu, deux opus, tous deux alternant à la première place pendant 12 semaines. Pour une artiste que tout le monde disait terminée, et au fond du trou … La fiancée des Français est comblée. Son public répond toujours présent et ses concerts se jouent à guichets fermés. Quant à Michel Berger, son soutien ne le quitte jamais.

Pour France Gall, les années 1980 sont teintées par les grandes actions humanitaires.

À cette époque, tous les artistes se lient pour défendre des causes qui leur tiennent à cœur, et la chanteuse tient à mettre sa main à la pâte. Hors de question pour elle de bouder les mouvements humanitaires qui voient alors le jour, tels que Chanteurs sans frontières, sous l’égide de Renaud. C’est d’ailleurs elle qui prendra le relais au Zénith de Paris, pour une série de concerts qui durera trois semaines. Dans le but de collecter des fonds, elle y chante les chansons Débranche, Calypso et Cézanne peint. En 1985, c’est la Chanson pour l’Éthiopie qui voit le jour, à laquelle elle prête sa voix.

France Gall s’associe également avec Michel Berger, Daniel Balavoine, Richard Berry et Lionel Rotcage, pour œuvrer pour le Mali, grâce à leur association Action Écoles. Déterminée à aider les pays d’Afrique où la famine et la sécheresse règnent, France Gall fait un appel aux dons dès qu’elle le peut en interview ou lors de ses passages télévisés. Sous la houlette d’Action Écoles, des écoliers volontaires vont récolter des denrées de première nécessité pour les pays du tiers-monde qui se meurent. Sous la vigilance des artistes, des tonnes de nourriture et des pompes à eau vont être expédiées pour faciliter la vie des populations, et sauver les habitants de ses villages en déclin …

Quand elle découvre le Sénégal, France Gall est sous le charme de cette terre sublime, désertique, assoiffée, qui l’accueille à bras ouverts. Elle n’a jamais su expliquer pourquoi elle était tant attirée par ces terres, ni pourquoi elle se sentait si bien là-bas. Elle racontera des années plus tard qu’une femme totalement démunie lui a un jour demandé d’adopter son fils Babacar. Elle a refusé, préférant lui envoyer de l’argent pour qu’elle puisse se payer un logement et assurer les besoins de son enfant.

Une autre préoccupation de France Gall a été le droit des femmes en France, mais aussi la protection des femmes démunies. Toutes ces femmes vivant dans la rue avaient le soutien de la chanteuse, qui n’hésitait jamais à prendre le temps de s’arrêter à leur hauteur et à s’asseoir lorsqu’elle en croisait une. D’ailleurs, la compagne de Michel Berger est devenue la marraine de l’association Cœur de femmes qui a œuvré pour la reconstruction des femmes en situation de grande difficulté, mais aussi leur réinsertion dans la société. Cette association qui tenait tant à la chanteuse était basée sur quatre principes : remonter aux sources de la souffrance de chaque femme, prendre en compte chaque femme dans sa globalité, puiser l’énergie nécessaire à un nouveau départ et permettre à chacune de retrouver sa dignité et les valeurs essentielles.

Le 14 janvier, le cœur de France Gall se brise : son ami, Daniel Balavoine, meurt. Tué dans un tragique accident d’hélicoptère. En 1987, elle chante le titre Évidemment, écrit par Michel Berger en hommage à leur ami disparu. En interview, des années plus tard, elle confiait à quel point il avait compté pour elle et son époux : « Quand nous étions attaqués dans les médias ou autres, personne ne nous a défendu comme lui. Cette force nous réconfortait. La première fois qu’on a vu et entendu Daniel, c’était à la télé : Michel et moi étions assis par terre dans notre chambre de Beauséjour et regardions par intermittence l’émission de Guy Lux. Quand il est entré pour chanter Lady Marlène avec un grand orchestre, nous avons eu un choc. Raide comme un piquet, planté derrière son micro sur pied, il a commencé à chanter d’une voix qu’on n’avait jamais entendue, avec un timbre nouveau et une tessiture tellement large et aigüe qu’on est resté bouché bée ».

L’émotion est nationale, mais cette disparition aussi tragique que soudaine brise le cœur de la chanteuse. Car Daniel Balavoine faisait partie de son cercle d’amis le plus proche ! France Gall a également révélé que son époux avait écrit le titre culte Tous les cris les SOS sur mesure pour Daniel Balavoine. « C’était rare pour un compositeur de pouvoir écrire une chanson aussi étendue musicalement. Un tour de force ! Michel, plutôt réservé, parlant doucement, face à Daniel, fougueux, qui le charriait et qui au fond l’admirait infiniment en tant qu’artiste … Michel était le premier à qui Daniel faisait écouter ses chansons ». Une amitié, qui a dépassé les studios d’enregistrement et le monde de la musique: « Nous passions Noël ensemble, les vacances d’été ensemble dans des maisons louées, on jouait au tennis, on allait au cinéma. Le duo qu’ils formaient était un moment de grâce absolu. Sa mort est un gouffre qui fera que plus rien ne sera comme avant ».

Le titre Évidemment va figurer sur l’album Babacar, sur lequel le titre Ella, elle l’a se démarque. L’hommage à Ella Fitzgerald restera en tête des ventes pendant quatre semaines en Allemagne. L’album sera le plus vendu de sa carrière. Après un passage à Grenoble, en 1987, France Gall croise la route d’un jeune homme curieux et bourré de talent, lors d’une émission de RTL destinée justement à trouver de jeunes espoirs de la musique française. Il s’agit de Calogero, dont elle va immédiatement déceler le talent, et duquel elle va parler à sa maison de production, Apache.

Qui dit nouvel album, dit nouveau spectacle. Sous l’impulsion de Babacar, France Gall réalise l’impressionnant Tour de France 88, mis en scène par Michel Berger, et qui va se jouer à guichets fermés. Un spectacle magnifique, durant lequel l’artiste va se produire pendant six semaines sur la scène du Zénith de Paris. Savoureux mélange des trois continents qu’elle aime tant, l’Amérique, l’Europe et l’Afrique, elle est accompagnée sur scène par le groupe de cuivres américain Phenix Horns, et par la troupe africaine Doudou N’Diaye Rose. Le show est sensationnel.

Après la tournée, France Gall a besoin de prendre du recul sur sa carrière. Malgré le triomphe de l’album et de la tournée, elle ressent comme une envie de se mettre en retrait. Le besoin de choyer ses enfants, de prendre le temps d’être maman … D’être une femme comme les autres tout simplement. Seulement voilà, Michel Berger prend mal cette décision de se retirer de la scène à un tel moment de sa carrière. Après tout, elle est au sommet de son art ! Ses spectacles se jouent à guichets fermés, ses fans sont hystériques, son album triomphe … Tout ce qu’elle touche se transforme en or, et l’empreinte qu’elle laisse sur son passage est un doux mélange de joie et de succès. Oui, mais voilà. Telle est sa décision. Et France Gall est une femme de conviction : quand elle a quelque chose derrière la tête, impossible de l’en empêcher.

Quelques mois après cette décision, elle reprend le chemin des studios et s’investit dans l’enregistrement d’un album avec Michel Berger. Une création à deux voix: l’album Double jeu. Nous sommes en juin 1992, le couple emblématique de la chanson française vient de tourner ensemble le clip du titre Laisser passer les rêves, lorsqu’ils annoncent une série de concerts dans les salles parisiennes. Hélas, cet été-là, Michel Berger meurt terrassé par une crise cardiaque …

Retour sur scène et arrêt de carrière

Michel Berger est mort. Le moral de France Gall est au plus bas. Pourtant, elle va tout faire pour rester debout. Bien sûr, il serait tentant de se cacher sous la couette et de ne plus sortir pendant plusieurs semaines … Mais elle ne peut agir ainsi. Après tout, elle est la maman de deux enfants, Raphaël, mais aussi Pauline, atteinte de la mucoviscidose, et qui a désespérément besoin d’elle. Il y a aussi ses proches, son public, et celui de Michel Berger qui, dévasté, a plus que besoin d’une apparition de sa veuve. Elle sera présente à l’enterrement, bien sûr, le regard baissé, le visage dévoré par le chagrin … Comment imaginer qu’une personne aussi bonne que Michel Berger puisse mourir aussi soudainement ? Emportée par un malaise cardiaque après une partie de tennis ? Un cauchemar … Hélas, elle ne va pas se réveiller. Tout ceci est bien réel.

Le 26 février 1993, quelques mois après le décès de son compagnon, France Gall va participer au spectacle des Enfoirés : Les Enfoirés chantent Starmania. C’est un grand spectacle, empreint de beaucoup d’émotions … Et pour cause, les chefs de file du spectacle sont partis : Coluche est mort, Daniel Balavoine et Michel Berger aussi. À la Grande Halle de la Villette, 25 artistes sont réunis sur scène. Le spectacle, composé uniquement des chansons du spectacle, fait un carton. France Gall, plus touchante que jamais, interprète seule sur scène la chanson Un garçon pas comme les autres. Il s’agit de sa première apparition publique depuis l’enterrement de Michel Berger. Sur scène, on sent qu’elle est habitée par une certaine tristesse.

Le projet de concert en duo est forcément interrompu. Comment réaliser un duo lorsque la deuxième personne a rendu son dernier souffle. France Gall a bien du mal à réaliser ce qui arrive et pourtant, elle va décider de ne pas enterrer ce dernier album. Et de remonter sur scène ! C’est le spectacle qu’elle devait normalement réaliser en duo avec Michel Berger. Et elle décide de le défendre seule. En hommage à l’homme qu’elle a tant aimé. Cet album, c’est leur dernier bébé … Et il est hors de question de le jeter à la poubelle sans l’avoir offert à leurs fans. Rendez-vous est pris pour le printemps 1993.

Initialement prévu pour 6 dates, le show à Bercy rencontrera un vrai succès et 2 dates supplémentaires devront être ajoutées ! Après tout, c’était la condition sine qua none. France Gall ne voulait plus chanter. Elle voulait se retirer de la scène pour se concentrer sur sa vie de femme et sa vie de maman. C’est Michel Berger qui l’avait convaincue de renouer avec le studio, et de réaliser ce nouveau défi ensemble. Hélas, la maman de Raphaël et Pauline se retrouve seule à assurer le spectacle. Mais elle le sait mieux que personne : The show must go on.

Un triomphe! La chanteuse est acclamée par les fans, si heureux de la retrouver. Encensée par la critique. C’est sa première scène depuis plus de 6 ans et le public communie avec France dans un spectacle minimaliste et dantesque à la fois (elle le présentera en disant : « Il y aura, je crois, un esprit … »). Faisant allusion à Michel Berger, et au fait que son âme plane sur le spectacle …

Une grande mélancolie. Pourtant, elle donne le change et assure le spectacle. Malheureusement, et alors qu’elle n’est toujours pas remise de la mort du père de ses enfants, une horrible nouvelle va venir la terrasser … Dans les coulisses des répétitions de son spectacle à Bercy, elle apprend qu’elle souffre d’un cancer du sein. Le temps que la chanteuse se soigne et qu’elle se rétablisse, il n’est pas question de lui infliger un stress supplémentaire. Elle doit se concentrer sur ses traitements … Les fans le comprennent et lui envoient des milliers de lettres de soutien. La France entière est aux côtés de France Gall, qui vient à peine d’enterrer son mari, et qui doit déjà affronter un nouveau combat : celui de la maladie.

France Gall se sent fatiguée. Elle vient tout de même d’affronter un cancer du sein, et la mucoviscidose de Pauline semble prendre de plus en plus de place dans leur quotidien. La jeune fille souffre. Les nuits sont compliquées.

Les quintes de toux sont de plus en plus violentes. Et malgré la kinésithérapie, la chanteuse a l’impression que sa fille est petit à petit en train de mourir … Pourtant, elle refuse de croire à cette idée et va tout faire pour rester la plus positive possible et donner à Pauline la force de croire qu’un avenir est possible. Les miracles existent : France veut y croire.

La tournée de Bercy est terminée et France Gall décide de créer un nouveau spectacle. Elle a compris qu’être sur scène et renouer avec son public était vital, c’était sa thérapie. Elle prévoit une série de spectacles à Paris, mais aussi en Belgique. Un spectacle plus joyeux qu’à Bercy. Si le manque de Michel Berger est toujours présent, la tristesse a laissé place à une sorte de nostalgie. Elle préfère se souvenir des jours heureux, et affiche désormais un sourire sur son visage. Elle confiera plus tard s’être « noyée dans la musique » après la disparition de Michel, pour surmonter cette épreuve que représente la vie sans son pygmalion.

Direction Los Angeles pour France Gall qui va vivre quelques mois sans ses enfants. Elle rêvait d’une épopée américaine, et va prendre beaucoup de plaisir durant cette période. Comme un second souffle ! Nous sommes en 1995. Elle enregistre l’album France, chante des chansons de Michel Berger customisées et s’entoure des plus grands musiciens. Dans sa somptueuse villa de Los Angeles, tout près de Malibu, la veuve de Michel Berger reprend petit à petit goût à la vie. Le soleil de la côte ouest américaine lui fait le plus grand bien, et les nombreuses rencontres qu’elle fait dans son quotidien lui apportent beaucoup de joie, et donnent de la couleur à ses chansons.

Retour en France, avec un nouvel album sobrement intitulé France. Malheureusement, alors qu’elle s’apprêtait à monter sur scène pour assurer la promotion de son nouvel album en France, elle découvre que l’état de santé de sa fille Pauline s’est nettement dégradé. La fiancée des Français culpabilise : elle réalise que sa fille a mal depuis des semaines, alors qu’elle prenait du bon temps au pays de l’oncle Sam. Certes, c’était nécessaire : France Gall avait clairement besoin de se reconstruire. Seulement voilà, son enfant avait besoin d’elle, et elle n’était pas là. C’est pourquoi elle va prendre une décision radicale. Hors de question de perdre une seconde de plus avec sa fille. Les médecins ne sont pas optimistes, et selon eux, il reste peu de temps à Pauline … C’est la raison pour laquelle France décide de mettre définitivement un terme à sa carrière de chanteuse. Pour cela, elle donne un concert privé sur la chaîne M6. Pauline mourra à la fin de l’année 1997, à l’âge de 19 ans. C’est un drame absolu pour la chanteuse qui se replie totalement sur elle-même. Pascal Obispo la contactera en 1998 pour lui proposer des chansons, mais elle ne donnera jamais suite …

En 2000, elle remonte sur scène aux côtés de Johnny pour chanter Quelque chose de Tennessee. Ce sera la dernière fois qu’elle chante sur scène. Médiatiquement parlant, elle ne fera plus d’apparition, ou presque. Elle fera parler d’elle en septembre 2002, lorsque les participants de la Star Academy chanteront Musique : la chanson de Michel Berger deviendra l’hymne de cette saison. De quoi contrarier France Gall qui se plaint auprès de la production de l’émission que la version de cette reprise ne correspond pas du tout à l’esprit de la chanson chantée par son défunt compagnon. Pour respecter la mémoire de Michel Berger, les apprentis chanteurs doivent alors retourner en studio pour enregistrer une nouvelle version.

Une longue période de deuil. S’isoler pour mieux se recueillir. Réapprendre à vivre sans son compagnon était déjà extrêmement difficile, mais comment vivre sans son enfant ? Sa fille adorée emportée à l’âge de 19 ans ? France Gall pointera de nouveau le bout de son nez le jour de l’anniversaire des 21 ans de la mort de Michel Berger alors qu’Europe 1 diffuse une interview dans laquelle elle annonce travailler à l’écriture d’un spectacle autour de Michel. Un projet qu’elle prépare depuis de longues années, et qui portera le nom de Résiste. Elle déclare que ce sont les femmes qui, depuis des années, lui demandent de créer ce spectacle et qu’après mûre réflexion, elle a décidé qu’il s’agissait du plus bel hommage qu’elle pouvait rendre à l’homme qu’elle a tant aimé : faire revivre cette chanson pour la nouvelle génération. C’est ainsi que le spectacle sera présenté Palais des Sports de Paris du 4 novembre 2015 au 3 janvier 2016, avant de partir en tournée en Belgique, en Suisse, et dans toute la France.

France Gall a rejoint le Paradis blanc !

Le 27 décembre au soir, Geneviève Salama, son attachée de presse publie un communiqué de presse suite à la révélation par un magazine du fait que la veuve de Michel Berger avait été hospitalisée.

Ainsi, afin de ne pas inquiéter les foules, l’attachée de presse de la star a tenu à préciser : « Dans un souci de toute transparence et pour mettre fin à cette déferlante, France Gall tient à informer ses amis, son public et les médias qu’elle a en effet été hospitalisée pour raison d’infection sévère et qu’elle est actuellement soignée. Cette annonce est dans le seul but que soit respectée sa vie à la mesure de sa discrétion et de sa pudeur. »

Ce n’est pas la première fois que l’interprète de Résiste se retrouve sous la surveillance des médecins. En février 2016 déjà, elle avait été hospitalisée dans ce même hôpital après avoir été victime d’un malaise. Les examens médicaux de la chanteuse avaient révélé des « résultats rénaux perturbés » ainsi que des indices « d’insuffisance cardiaque ».

C’est en avril 1993, neuf mois après la crise cardiaque qui a emporté Michel Berger, l’amour de sa vie, que France Gall découvre qu’elle est atteinte d’un cancer du sein. L’horreur pour la chanteuse, qui doit aussi gérer la maladie de sa fille Pauline, atteinte de la mucoviscidose. Lors d’une interview donnée à Gala, la chanteuse avait raconté cette épreuve : devoir se battre contre tant de maladies, alors que la mort vient de s’abattre sur sa famille: « C’était un cauchemar quand je l’ai appris, comme tout le monde. En très peu de temps, on passe dans le monde de la maladie, des malades, c’est une autre planète. J’ai eu très peur. À l’annonce de la mort de Michel, j’ai ressenti une douleur dans le ventre, dans le corps, tellement forte, je me suis dit qu’elle devait ressortir d’une manière ou d’une autre. Mon cancer était la concrétisation de mon mal intérieur. » Prise en charge suffisamment tôt, France Gall avait été opérée avec succès le 22 avril 1993.

Hélas, après plusieurs semaines de lutte, France Gall a perdu sa bataille contre le cancer. Quelques jours avant sa mort, sa chargée de communication avait annoncé à l’AFP que la chanteuse s’était éteinte après avoir « défié depuis deux ans, avec discrétion et dignité, la récidive de son cancer ». Elle a rendu son dernier souffle dans les bras de son fils adoré, Raphaël Hamburger, et de son compagnon, Bruck Dawit.

L’hommage des célébrités

Hugues Aufray : « Je revois la petite fille, qui est avec son papa, qui vient me voir pour me présenter une chanson en 1959 », s’est souvenu Hugues Aufray en apprenant le décès de l’artiste. En effet, la première fois qu’il l’a rencontrée, France n’avait que 12 ans. Car oui, sa carrière avait démarré très tôt : « Très peu de temps après notre rencontre, en 1959, elle a commencé à devenir une véritable vedette avec ses premières chansons qui ont été des succès tout de suite » ! Il s’est aussi rappelé à quel point l’artiste avait un truc en plus : « Elle avait une voix de petite fille, elle chantait très juste avec une véritable naïveté. Je crois qu’elle était sincère absolument, elle n’a jamais joué aucun rôle. Elle était nature. Je crois que c’est ça, son succès : son naturel. C’était une petite jeune femme charmante, qui riait tout le temps ».

Karine Ferri : Karine Ferri et France Gall avaient un point commun : celui d’avoir toutes les deux perdu quelqu’un de la mucoviscidose. Pour l’animatrice de TF1, Grégory Lemarchal, son compagnon. Pour l’interprète de Si maman si, sa fille, Pauline. Alors, pour lui rendre un dernier hommage, la compagne de Yoann Gourcuff a publié une photo où elle pose avec la chanteuse. En commentaire, Karine Ferri s’est souvenue du « doux moment » partagé avec cette dernière « le temps d’une interview pour RFM ». Elle a terminé son tweet en écrivant « Au revoir. Vous allez nous manquer ».

Jane Birkin : Lorsque Jane Birkin a perdu sa fille, Kate, après que cette dernière avait sauté du quatrième étage de son appartement parisien, elle a pu compter sur le soutien infaillible de France, qui a elle aussi connu le traumatisme de la perte d’un enfant ! Pourtant, les deux femmes ne se connaissaient pas ! Elles s’étaient croisées une fois, dans les années 80, mais ne s’étaient jamais fréquentées. En revanche, la fille de Jane Birkin était très proche de la compagne de Michel Berger, comme l’a confié la chanteuse anglaise dans son interview : “Kate, ma fille, la connaissait très bien. Elle me disait toujours: “Ah, tu aimerais bien France”, Lorsque Kate est morte, France a sonné à ma porte. Elle organisait des déjeuners, des dîners, des gens qui venaient avec des plats, très émus et très raisonnables à la fois. Quelque chose de solidaire. Elle a vécu tant de choses tristes. Elle avait ce charme particulier”. Puis, Jane a tenue à saluer ses chansons, mais aussi, son engagement humanitaire : “Elle était très discrète, mystérieuse. Elle ne se vantait pas des choses qu’elle faisait. Elle faisait les choses en douce. Je savais juste qu’en Afrique, elle s’occupait des gens sans moyens. Je n’arrive pas à l’imaginer morte … ».

Jenifer : Lorsque Jenifer a sorti son album hommage à France Gall, comportant des reprises des chansons de l’artiste, elle a assuré que cette dernière était au courant, et qu’elle avait validé le projet. Sauf que voilà, de son côté, France a assuré le contraire, lâchant en interview : « Elle raconte des bobards, je n’étais au courant de rien » ! Un clash qui avait conduit Jenifer à annuler sa tournée, et qui avait laissé des traces entre les deux interprètes qui ne s’étaient jamais plus reparlé. Seulement voilà, en apprenant la mort de cette artiste qu’elle respectait tant, la chanteuse corse n’a pu s’empêcher de publier un message sur son compte Facebook : « Une autre artiste majeure nous quitte, triste saison pour la chanson française. Mon respect éternel à France Gall. »

Emmanuel Macron et François Hollande : Comme il l’avait fait lorsque Johnny Hallyday nous a quittés, Emmanuel Macron a tenu à prendre la parole pour exprimer toute sa tristesse suite au décès de France Gall. Il faut dire que comme Johnny, la blonde était un emblème national, une artiste qui a su sans cesse se renouveler, traversant les époques grâce à sa sincérité et à &a générosité : « Elle laisse des chansons connues de tous les Français et l’exemple d’une vie tournée vers les autres, ceux qu’elle aimait et ceux qu’elle aidait », a écrit le président de la République sur son compte Twitter. Même son de cloche du côté de son prédécesseur François Hollande: « France Gall était une chanteuse lumineuse, qui a su donner sa voix aux plus grands auteurs, et notamment Michel Berger. Elle a fait de ses chansons des succès qui sont entrés dans notre patrimoine musical. »

Françoise Hardy : Elle était de trois ans plus âgée que France Gall, et pourtant, Françoise Hardy s’est toujours sentie toute petite aux côtés de l’artiste, tellement elle l’admirait. Interrogée par Europe 1, elle a confié que France Gall avait amené quelques chose de différent dans la chanson française, et qu’elle était terriblement triste de savoir qu’elle était décédée : « J’étais vraiment une fan de France Gall. J’ai tous ses disques, j’allais la voir chanter à chaque fois qu’elle faisait une scène à Paris, je connaissais tout, pas par cœur, mais presque. »

Charles Aznavour : Sur le plateau de France 2, lors de l’émission hommage diffusée suite à la mort de la chanteuse, Charles Aznavour s’est souvenu des débuts de France Gall, alors que celle-ci ne souhaitait pas se lancer dans une carrière d’artiste. Il s’est rappelé que c’est son père qui l’avait encouragée à chanter, persuadé du talent d’interprète de sa progéniture : « Il avait amené sa fille à Bruxelles pour que je la pousse à chanter. Elle ne voulait pas chanter, mais lui trouvait qu’elle avait une voix merveilleuse. Heureusement, elle a finalement accepté de le faire, et elle a fait une carrière extraordinaire », a confié le chanteur avec émotion. « Elle est pour toujours dans le cœur des Français. C’est une grande perte »

Une dernière scène avec Johnny

Avec la disparition de France Gall, c’est l’esprit d’une génération tout entière qui s’éteint ! En effet, le 7 janvier dernier, la chanson française a perdu l’une de ses icônes. Et si ses tubes – Poupée de cire, poupée de son, Babacar, Cézanne peint, Si maman si… – resteront à jamais gravés dans les mémoires, beaucoup ont oublié que la chanteuse n’était pas remontée sur scène depuis plus de 17 ans ! Car après la mort de Michel Berger, et celle de sa fille Pauline, elle avait choisi de ne plus faire de scène, et d’arrêter de chanter. L’envie n’était plus là. Pourtant, elle était remontée sur scène une dernière fois, le 15 août 2000. Ce soir-là, elle avait chanté Quelque chose de Tennessee, l’un des plus grands hits de Johnny Hallyday, sur la scène de l’Olympia, main dans la main avec le rocker. Dans la version originale de cette chanson écrite par Michel Berger en hommage au dramaturge Tennessee Williams et sortie en octobre 1985, France Gall figure dans les chœurs avec son mari. Son duo avec Johnny Hallyday à l’Olympia a été sa dernière prestation sur scène.

À la mi-décembre 2017, France Gall qui combattait un cancer en secret depuis plus de deux ans avait été rattrapée par la maladie et hospitalisée suite à une infection sévère. Et forcément, si fragile, elle n’avait pas pu se rendre à l’hommage populaire du Taulier du rock, célébré le 9 décembre en l’église de la Madeleine. De toute façon, ses médecins l’en auraient empêchée, son état de santé était trop grave … Pourtant, l’artiste avait tenu à publier un long message en l’honneur de ce fidèle ami qu’elle a tant aimé : « Je suis infiniment attristée par l’annonce du départ de Johnny. Je salue l’artiste unique, l’ami fidèle. J’ai toujours été touchée par sa gentillesse, son charisme, sa voix irremplaçable et son sourire irrésistible. Je garde en moi 50 ans de souvenirs et d’amitié et plus particulièrement les instants inoubliables passés avec Johnny et Michel lors de leur rencontre artistique. Aujourd’hui, toutes mes tendres pensées se tournent vers Laeticia, David, Laura, Jade et Joy, Comme une étoile qui s’éteint dans la nuit sans un éclat de voix et sans un bruit. Ainsi disparut Johnny. »

Les secrets de France Gall

Terrifiée par un cheval / Alors qu’elle prenait la pose à Chantilly, dans le cadre d’un shooting photo réalisé pour le journal Mademoiselle Âge tendre, sur un splendide cheval de course, France Gall a eu la peur de sa vie ! En effet, lors de cette chevauchée banale, ce dernier a pris la fuite a près de 60 km/h ! Plutôt que de continuer cette folle chevauchée, elle avait préféré se jeter par terre. La chanteuse n’étant pas une grande cavalière, elle était terrifiée, forcément. Et elle avait le corps bien endolori. Suite à cet événement, elle a refusé d’approcher un cheval jusqu’à la fin de ses jours …

Sa phobie de la raie au beurre noir, et sa passion pour les œufs brouillés aux tomates / Le saviez-vous ? France Gall ne supportait pas ce plat bien spécifique qu’est la raie au beurre noir. Elle le détestait tellement qu’elle ne pouvait même pas en supporter l’odeur. Par contre, elle adorait les œufs brouillés aux tomates ! En interview, elle avait assuré qu’elle les préparait « génialement ».

Elle assortissait ses chaussures à la couleur des rideaux / Drôle, et pourtant, France Gall aimait que les couleurs soient coordonnées. D’ailleurs, elle avait pris l’habitude d’assortir ses chaussures de scène, durant ses concerts, à la couleur du rideau. Au fil des années, c’est devenu une sorte de superstition qu’elle n’a jamais oubliée. D’ailleurs, elle avait assuré en interview qu’elle ne pourrait tout simplement pas chanter si ces conditions n’étaient pas remplies.

Les clubs et les boites de nuit : sa phobie / France Gall était, comme Michel Berger, plutôt adepte de la carte de la discrétion. Tant qu’elle le pouvait, elle évitait les soirées mondaines, les tapis rouges, et les clubs. D’ailleurs, elle mettait un point d’honneur à ne se rendre dans aucune discothèque, contrairement à ses amis stars. Elle ne fréquentait jamais Chez Castel ni Chez Régine, pas plus que le Bilboquet ou le Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club, lieux tendance où les stars aimaient se retrouver des années 60 aux années 80.

Elle avait des problèmes pour s’endormir / Vous imaginiez que France Gall avait un sommeil de bébé ? Qu’elle s’endormait facilement, et que lorsqu’elle était dans les bras de Morphée, il était impossible de l’en sortir ? Et bien non! Pas du tout! Pour la blonde, s’endormir était un véritable calvaire. Si la maison n’était pas parfaitement silencieuse et surtout si la chambre n’était pas totalement noire, elle ne pouvait pas trouver le sommeil. De plus, le moindre bruit suffisait à la réveiller.

En Guadeloupe, elle est une grande star / Si France Gall est devenue une star en France, sachez qu’en Guadeloupe, tout le monde se levait sur son passage ! D’ailleurs, c’est de l’île sublime que venait la majeure partie de son courrier de fans !

Elle était accro à son kimono / France Gall aimait le Japon. Au cours d’un voyage, elle s’est même offert un kimono à fleurs, qu’elle avait pour habitude de porter constamment. Elle répétait à qui voulait l’entendre que ce kimono était le vêtement dans lequel elle se sentait le mieux !

Elle ne supportait pas l’avion / La chanteuse faisait partie des stars qui ne supportent pas l’avion. Et pour cause, un jour, elle a bien cru mourir dans les airs ! À l’époque, elle voyageait dans un petit biplace lorsque soudain, une tempête a éclaté. Le pilote a réalisé un atterrissage forcé, et l’avion s’est écrasé au sol, à 100 km/h. Horrible. Le pilote était assommé, mais France, elle, a survécu. Elle est sortie de l’accident indemne, avec seulement un œil au beurre noire.

Son cœur s’est arrêté de battre / Et oui, France Gall était une miraculée ! Lorsqu’elle s’est fait opérer des amygdales, alors qu’elle n’avait que 9 ans, son cœur s’est soudainement arrêté de battre. Les médecins se sont battus pendant près de deux heures pour la réanimer, et finalement, elle est revenue à la vie.

Elle est issue d’une famille de musiciens / Depuis toute petite, France Gall, née Isabelle Gall, a baigné dans l’univers de la musique. Son père, Robert, était un acteur, chanteur, compositeur, très connu du monde de la musique. Ce dernier a notamment écrit des chansons pour Charles Aznavour ou encore Édith Piaf. Mais ce n’est pas tout ! Elle avait aussi monté un orchestre avec Patrice et Philippe, ses deux frères, aux côtés desquels elle se produisait souvent sur scène.

Sa rupture avec Claude François a inspiré l’un des plus grands litres de la chanson française / Vous êtes sûrement au courant de l’histoire d’amour tumultueuse qui a existé entre France Gall et Claude François, et de leur rupture suite à la victoire de la chanteuse à l’Eurovision. Bien sûr, ils se sont rabibochés, détestés, séparés, de nouveau aimés, avant de se quitter pour de bon. Mais saviez-vous que cette rupture particulièrement douloureuse avait inspiré à Claude François l’un de ses plus grands tubes : Comme d’habitude.

Jean-Luc Godard a réalisé un de ses clips / En 1996, France Gall sortait un titre particulièrement puissant : Plus haut et elle voulait un clip qui ne le soit pas moins. Elle a alors demandé à Jean-Luc Godard de réaliser un clip vidéo à la hauteur de la chanson.

Babou, son surnom / Si vous avez bien suivi, Isabelle était son vrai prénom. Et son papa lui avait trouvé un surnom charmant, que tous les membres de sa famille, ses proches, ses amis, utilisaient : Babou. Un surnom qui ne l’a jamais quittée, et ce, jusqu’à sa mort.

Elle a failli être Alice au Pays des Merveilles / C’était dans les années 50 … À cette époque, France Gall était contactée par Walt Disney. Incroyable, mais vrai : le fondateur de la firme aux grandes oreilles n’était pas satisfait du résultat de son long-métrage Alice au pays des Merveilles. Musicalement parlant, le rendu n’était pas celui qu’il espérait. Alors, il a contacté France Gall pour qu’elle prête sa voix à son personnage onirique d’Alice. Étonnant, mais la chanteuse était très excitée par ce projet qu’elle a validé, et ce, alors qu’elle avait jusque-là refusé tous les autres projets cinématographiques qui lui avaient été proposés. Hélas, Walt Disney est mort, et le projet a été enterré lui aussi.

The Weeknd était fan de France Gall, et elle a inspiré Tarantino / Fait improbable : l’influence de France Gall a dépassé la France, et même, le Vieux Continent. D’ailleurs, la star canadienne The Weeknd a rendu hommage à l’artiste en reprenant la chanson Laisse tomber les filles, sur son opus Montréal. En 2007, le film de Quentin Tarantino Boulevard de la Mort avait déjà utilisé pour sa B.O. la reprise de cette même chanson avec une version d’April March intitulée Chick Habit (1996).

Ses histoires d’amour et ses ruptures ont inspiré des tubes / Quand on pense à France Gall, on pense aussitôt à son duo mythique, à la scène, comme à la ville, avec Michel Berger. Mais avant de rencontrer celui qui deviendra quelques années plus tard le père de ses enfants, la petite fiancée des Français a connu d’autres hommes. Claude François, ou encore Julien Clerc qui, lui aussi, s’est inspiré de leur séparation pour écrire un tube bien connu du grand public : Souffrir par toi n’est pas souffrir.

Elle a refusé un film de Michel Berger / La comédie musicale Disney, et l’épisode manqué suite à la mort de Walt Disney, auraient pu lui donner envie de devenir actrice, mais non. Elle n’a jamais trouvé de projet qui la faisait vibrer, et puis même, son job, c’est d’être chanteuse, voilà tout … En 1988, elle a même refusé de jouer dans un projet de film musical sur Michel Berger : « J’ai refusé de faire ce film à la grande tristesse de Michel parce que je déteste jouer la comédie. »

Côté crinière / « Petite, j’ai toujours rêvé d’être blonde aux yeux bleus alors que je suis châtain naturellement. Quand j’ai commencé ma carrière, j’ai tout de suite eu envie de changer de couleur et pendant plusieurs mois, j’ai éclairci petit à petit jusqu’à devenir très très clair, presque platine. »

Des lentilles pour sublimer ses yeux ? / « J’ai aussi essayé de porter des lentilles de couleur bleue, mais en fait je préfère mes yeux marron, je trouve que mon regard a plus de force au naturel. »

Ses odeurs préférées / « J’adore celle du jasmin, elle me rappelle les vacances que je passais petite à Vallauris, le village des potiers au milieu des champs de jasmin et où Picasso venait peindre tous les après-midi une jolie femme à la queue-de-cheval très haute. J’avais 6 ans … J’adore aussi celle du savon à l’œillet de Roger & Gallet qu’utilisait ma grand-mère, c’est un peu ma Madeleine de Proust.»

Mille et un parfum / « Dans les années soixante, j’étais dingue de « Agua di colonia fresca » et c’est aussi à cette époque que j’ai découvert tous les parfums de Guerlain qui restent à ce jour le Top pour moi, même si je n’en mets plus. Dans les années soixante-dix, arrive “Jungle Gardenia” que Sylvie Vartan portait. Hum ! c’est l’odeur de la Californie que je découvrais avec Michel. Et petit à petit, je me suis tournée vers des parfums masculins parce que finalement je n’aime pas les senteurs trop “fifilles”. J’ai commencé par “l’Eau du navigateur” de l’Artisan Parfumeur achetée à Saint-Barthélemy dans les années quatre-vingt. Ensuite tous les “Messieurs” y sont passés – Chanel, Guerlain, Saint Laurent, Armani, Dolce & Gabbana. En fait chez moi j’ai tout un tas de parfums que je choisis en fonction de la tenue, du temps, de l’humeur. Mais il m’arrive aussi de porter Chanel n°5. Quand je suis en Afrique, c’est différent. Là-bas, un flacon coûte un mois de salaire alors on parfume les maisons avec du tchourai, une pâte de fleurs et d’essences de fleurs que l’on fait brûler dans toutes les pièces. »

Son cadeau préféré / « Quand j’ai un cadeau à faire pour une amie, je vais à la boutique Shu Uemura et je lui compose une trousse complète – crayon, rouge à lèvres, fond de teint, pinceau, ombres à paupières – et je lui offre en la maquillant car j’adore maquiller les autres. C’est original, non, comme cadeau ! »

Le maquillage dont elle est accro / « Si je ne devais faire qu’une chose avant de sortir, ce serait colorer mes lèvres. Je les dessine au crayon après avoir appliqué une crème qui les repulpe, puis j’applique mon rouge à lèvres avec un pinceau et c’est parfait.»

Jamais sans mon vernis / « Quand je vivais à Los Angeles, j’adorais me faire les ongles blancs d’une main, et mettre du vernis noir sur l’autre. Aujourd’hui, il m’arrive de faire la même chose avec de l’orange vif et du rose fuchsia, mais en règle générale, j’aime les roses dragées, opalins, ou les teintes très foncées, comme le rouge noir de Chanel, ou les bleus et vert bouteille de Shu Uemura … Aujourd’hui, mes ongles sont turquoise. »

Son endroit préféré / « Quand j’en ressens le besoin, je vais faire une cure à l’Espace Henri Chenot en Italie. J’aime ce lieu et on en ressort vraiment régénéré. Sinon je crois aux principes de la chrono nutrition, une façon intelligente de se nourrir … »

Le bronzage, oui, mais pas trop / « J’adore être tannée, bien bronzée, mais je ne tiens pas plus de 10 minutes en place sur un transat parce que la chaleur et la luminosité m’agressent très vite. En Afrique, j’ai toujours un chapeau pour me protéger et je suis sans cesse à la recherche de l’ombre. »

Magazine : Info Dimanche Collection
98 pages consacrée à France Gall / Numéro spécial
Date : Mai / Juin / Juillet 2022
Numéro : 2

Éditeur : FRANCE QUOTIDIEN (Gérant : Robert Lafont) – 53, rue du Chemin Vert – 92100 Boulogne- Billancourt Directeur de la publication : Philippe Miot, contact@mmediapublication.fr – Distribution : MLP – Service de vente : IPRESS, Dominique BELLEVRAT – Impression : Mordacq (62) – (imprimé en France/printed in France) – Communication environnementale : Papier couverture : Origine du papier : France – Taux de fibres : recyclées : 0% – Certification : PEFC – Eutrophisation : 0.01 kg/tonne. Papier intérieur : Origine du papier : Allemagne – Taux de fibres : recyclées : 100% – Certification : PEFC – Eutrophisation : 0.003 kg/tonne.

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