La saga de Starmania

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Luc Plamandon, l’auteur, raconte la création de la célèbre comédie musicale.

Plus qu’un succès, « Starmania » tient du phénomène.

L’album (un million d’exemplaires vendus en France) fourmille de tubes : “Le blues du businessman”, “Les uns contre les autres”, “Le monde est stone” … Sur scène, l’opéra-rock de Michel Berger et Luc Plamandon a été joué à Paris, Montréal, adapté en allemand et en espagnol. Des producteurs brésiliens et japonais s’y intéressent. De plus, la version anglaise, rebaptisée “Tycoon”, laisse présager un séisme dans les hit-parades anglo-saxons. Et pour cause : ses textes sont signés de Tim Rice (auteur de « Jésus-Christ superstar» et d’ “Evita”) et chantés par Cindy Lauper, Kim Carnes, Peter Kingsbery … Michel Berger, avant de disparaître brutalement le 2 août dernier, avait peaufiné ces nouveaux arrangements et concrétisait ainsi un vieux rêve : voir jouer sa musique au-delà de nos frontières.

L’histoire de ce «miracle» démarre en 1975. Michel Berger propose à Luc Plamandon parolier de Diane Dufresne, Julien Clerc, Robert Charlebois, de lui écrire un opéra-rock.

“Au départ, se souvient l’auteur québécois, Michel voulait s’inspirer de la vie de Patricia Hearst. Puis le projet a évolué. On s’est vus pendant trois-quatre mois pour mettre au point l’histoire. Le démarrage a été long. On se croisait, on échangeait des bouts de textes, de musique. Finalement, on s’est enfermés un mois dans une maison. Au bout de ce mois, on avait écrit sept ou huit chansons. Là, on a su qu’on ne pouvait plus reculer, qu’on tenait quelque chose.”

Ce “quelque chose” devient un album à succès puis, en 1979, un spectacle monté au Palais des Congrès. Sur scène, avec France Gall, vont se révéler au public français Diane Dufresne, Fabienne Thibeault, Nanette Workman, Daniel Balavoine. Les chansons deviennent des tubes “Starmania” s’exporte au Québec. “Le show a été monté une première fois en 1986, avec des inconnus, explique Luc Plamondon. Un triomphe. Michel est venu le voir. On s’est rendu compte que ça fonctionnait presque mieux qu’à la création, parce que les thèmes étaient devenus encore plus actuels. Ça nous a donné l’envie de le refaire à Paris, avec un nouveau casting. Mais nous étions prisonniers de la distribution d’origine, devenue mythique. Les gens demandaient: mais qui va remplacer Fabienne Thibeault, France Gall, Daniel Balavoine ? C’était un défi à relever.”

En 1989, Starmania triomphe au Théâtre de Paris, puis joue les prolongations à Marigny. On découvre une nouvelle grande voix : la chanteuse Maurane.

Lorsqu’il cherche les raisons de ce déferlement international, Luc Plamondon hésite. “Je crois que la force de Starmania, c’est que Michel et moi avons tout mis, tout ce que nous ressentions vis-à-vis du monde. Nous voulions une fresque du 20e siècle avec des personnages démesurés, tous symboliques. C’est une fable, pas une œuvre réaliste, qui se voulait visionnaire, et qui l’était peut-être, puisqu’on peut encore la jouer comme si l’histoire se passait aujourd’hui.» Plus que le succès, c’est son universalité qui réjouit Luc Plamondon. “On se dit qu’on a touché une corde sensible. Quand Marie-Jeanne, la serveuse, chante “Je voudrais faire quelque chose que j’aime, mais je ne sais pas ce que j’aime”, ça concerne beaucoup de gens. Quand j’ai écrit: “J’aurais voulu être un artiste”, je ne me doutais pas de la force d’identification qu’aurait la phrase sur le public. Aujourd’hui, tout le monde rêve d’être star, même trois minutes.»

“Le blues du businessman” a eu pour interprètes rien moins que Claude Dubois, Etienne Chicot, Nicole Croisille, François Valéry. Des “amateurs” : Alain Delon, Bernard Tapie, Michel Drucker, s’y sont essayés. “Johnny Hallyday parle de la reprendre, ajoute Luc Plamondon. Elle a été classée troisième chanson la plus populaire du Québec. Et quand Claude Dubois la chante, la salle se lève, comme pour un hymne national !”

FRÉDÉRIC KARPYTA

Magazine : Télé Star
Date : 6 au 12 mars 1993
Numéro : 857

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